Etude: D'où vient la maladie Alzheimer? La theorie principale contestée
Une étude publiée jeudi 2 juin discute la principale hypothèse concernant les causes de la maladie d'Alzheimer, s'ajoutant à la remise en question générale de cette théorie, écrit Huffpost.
“Ces nouveaux éléments bouleversent ce que l’on pense sur la progression de la maladie d’Alzheimer”, a conclu le biologiste américain Ralph Nixon, suite à la parution d’une étude sur la maladie d’Alzheimer, qu’il a dirigé, dans la revue Nature Neuroscience.
Publiée jeudi 2 juin, celle-ci décrit de nouveaux mécanismes pouvant conduire à la maladie d’Alzheimer et s’ajoute ainsi au mouvement de remise en cause de la principale hypothèse sur le fonctionnement de la maladie. C’est en effet l’hypothèse de la “cascade amyloïde” qui sert de base à l’essentiel des recherches depuis une vingtaine d’années, mais sans succès apparent.
Si la maladie d’Alzheimer est la démence la plus fréquente, ses causes et ses mécanismes précis restent largement ignorés. Parmi les certitudes: celle que les malades présentent systématiquement des plaques de protéines, dites amyloïdes, qui se forment autour de leurs neurones et finissent par les détruire.
Mais s’agit-il d’une cause primaire ou de la conséquence d’autres phénomènes? Selon l’hypothèse de la “cascade”, toute la maladie découlerait de la formation de ces plaques. Ce qui fait de moins en moins consensus chez les scientifiques.
Dernier travail en date à remettre en cause cette hypothèse: l’étude publiée jeudi 2 juin dans la revue Nature Neuroscience. Selon celle-ci, le processus de la maladie démarrerait en effet à l’intérieur des neurones et non à l’extérieur. Réalisée sur des souris génétiquement modifiées pour induire un équivalent de la maladie d’Alzheimer, elle met en avant un dysfonctionnement des lysosomes, cette petite partie du neurone lui sert à “digérer” des composants inutiles ou dégradés.
Large remise en cause de la théorie de la cascade amyloïde
Les chercheurs ont établi que ces lysosomes s’abîment et perturbent le fonctionnement du neurone. Surtout, ce mécanisme provoque l’apparition de filaments d’amyloïdes dans la cellule, bien avant l’apparition de plaques à l’extérieur. Les plaques amyloïdes seraient donc une conséquence et non une cause de la maladie.
Si ces travaux ne changent néanmoins pas à eux seuls la donne, notamment car il faudra confirmer que les mêmes mécanismes sont à l’œuvre chez l’humain, ils s’inscrivent dans un mouvement plus général de remise en cause de la théorie de la cascade amyloïde.
Aucun traitement visant à empêcher la formation de plaques amyloïdes n’a en effet fait ses preuves contre la maladie. Seul un médicament développé par l’américain Biogen a été approuvé, en 2021, par les autorités américaines, mais son intérêt reste très contesté au sein de la communauté scientifique.
“Il y a toujours beaucoup de preuves de l’intérêt de l’hypothèse de la cascade amyloïde pour expliquer la pathogenèse de la maladie d’Alzheimer”, nuance néanmoins la neurologue britannique Tara Spire-Jones auprès de l’AFP, ne rejetant pas en bloc cette première hypothèse. “Mais l’amyloïde est loin de tout expliquer”, souligne-t-elle.
Trois maladies d’Alzheimer?
Plusieurs chercheurs suggèrent plutôt un rééquilibrage des connaissances, en envisageant qu’il existe plusieurs formes de la maladie d’Alzheimer, dans lesquelles la cascade amyloïde joue un rôle plus ou moins important.
Fin 2021, plusieurs chercheurs européens, menés par l’italien Giovanni Frisoni, avaient suggéré de diviser les maladies d’Alzheimer en trois grandes catégories, après avoir passé en revue quelque 200 études sur celles-ci.
Si dans la première, la cascade amyloïde serait bien le mécanisme principal, cela représenterait une minorité de patients, souvent atteints d’une forme précoce avant 50 ans, et chez qui le rôle d’une mutation génétique précise semble avéré. En revanche, la dernière catégorie d’Alzheimer, dans laquelle le rôle des plaques amyloïdes serait le moins déclencheur, concernerait la moitié des patients, soit de loin le plus grand nombre de malades.