Chute du régime syrien : une transition sous le regard prudent de la Turquie
Le 8 décembre marque un tournant majeur dans la crise syrienne avec la chute du régime de Bachar el-Assad et le contrôle de Damas par les rebelles.
Alors que la Turquie, voisine de la Syrie, a joué un rôle clé en soutenant certains groupes rebelles, Ankara appelle désormais à une « transition en douceur » pour stabiliser la région.
Une satisfaction prudente à Ankara
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a réagi avec une satisfaction mesurée, affirmant que la Turquie se trouvait « du bon côté de l’Histoire ». Autrefois proche d’Assad, Erdogan s’était éloigné de lui dès les premières années de la guerre civile en soutenant des factions de l’opposition syrienne. Bien qu’Ankara n’ait pas engagé directement de troupes dans l’offensive, elle aurait donné un feu vert tacite aux groupes rebelles, dont Hayat Tahrir al-Sham (HTS), qui ont conduit l’assaut final.
Cependant, Erdogan, connu pour son pragmatisme, ne s’attendait pas à une évolution aussi rapide des événements. Aujourd’hui, la Turquie tente de tirer parti de cette nouvelle situation tout en restant attentive aux risques qu’elle comporte.
Opportunités et enjeux pour la Turquie
Avec la fin du régime d’Assad, Ankara espère renforcer sa position dans la région. Le président Erdogan a exprimé à plusieurs reprises son mécontentement face à l’absence de dialogue avec le régime déchu sur deux dossiers cruciaux : la sécurisation de ses frontières contre les forces kurdes et le retour des 3 millions de réfugiés syriens présents sur le sol turc.
Le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, a déclaré : « Nous pensons que le nouveau gouvernement dialoguera avec nous, contrairement à Assad. » Ce changement pourrait ouvrir la voie à des négociations plus favorables aux intérêts turcs.
Une prudence face aux incertitudes
Malgré ces espoirs, Ankara reste sur ses gardes. Les rebelles syriens ne forment pas un bloc homogène. Si la Turquie soutient principalement les factions de l’Armée nationale syrienne (ANS), elle n’a pas le même contrôle sur HTS. Cette situation pourrait provoquer des tensions entre les différents groupes dans leur lutte pour le pouvoir.
Un autre point d’inquiétude pour la Turquie est l’avenir des forces kurdes. Si les nouveaux dirigeants de Damas décidaient de collaborer avec les Kurdes, cela irait à l’encontre des intérêts turcs. Pour éviter ce scénario, Ankara a déjà demandé à l’ANS de lancer une offensive au nord contre la ville de Manbij, contrôlée par les Kurdes depuis 2016.
Une transition sous haute tension
La chute du régime d’Assad ouvre une nouvelle ère en Syrie, mais elle est loin de garantir la stabilité. Pour la Turquie, l’objectif est de maintenir un équilibre entre ses intérêts sécuritaires, ses ambitions régionales et les défis posés par les nouvelles dynamiques syriennes. Cette prudence montre qu’Ankara, bien qu’optimiste, reste consciente des nombreux obstacles à surmonter.