Civilisation : Pourquoi la plupart des statues de l’Égypte antique ont-elles le nez cassé ?
De nombreuses statues de l’Égypte antique ont le nez brisé. Cette partie prédominante du visage aurait-elle était victime des affres du temps, d'une construction fragile, ou d'un acte de malveillance ? En comparant différentes statues au nez manquant, des
Le Sphinx de Gizeh, les statues de Cléopâtre, les bustes de Toutânkhamon : pourquoi et comment tant de statues des mythiques pharaons, qui se sont si bien conservées dans le temps, ont-elles bien pu perdre le bout de leur nez ?
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Comment le Sphinx de Gizeh a-t-il perdu son nez ?
Dans Astérix et Obélix, ce dernier casse le nez du légendaire Sphinx de Gizeh en l'escaladant. En réalité, ces deux gaulois, fruits de l'imagination de René Goscinny et Albert Uderzo, n'y sont bien sûr pour rien. Pas plus que Napoléon de Bonaparte, affirment des archéologues, à qui la la légende impute la destruction de l'appendice nasal du Sphinx... par des boulets de canon qu'auraient tiré ses armées. Alors, qu'en est-il vraiment ?
Selon l'historien égyptien Ahmad al-Maqrîzî ayant vécu au Caire (1364-1442), la faute reviendrait au sultan Mohammed Sa'im al-Dahr. Considérant la statue comme un dieu païen, il l'aurait détruit au cours du XIVe siècle, avant d'être lui-même tué en représailles par les paysans qui avaient pour coutume de déposer des offrandes au Sphinx afin de s'assurer de bonnes récoltes. Pour comprendre les causes de ce phénomène étonnamment répandu chez les statues de l’Égypte antique, des égyptologues ont comparé les différents trous laissés par l'absence du nez. Et révèlent qu'il s'agirait non pas d'une destruction par le temps, mais bien d'un acte délibéré.
Détruire les statues pour briser le lien entre Hommes et Dieux
Qui oserait donc commettre un tel acte de vandalisme sur des monuments de culte ? D'après le conservateur du Musée de Brooklyn et égyptologue, Edward Bleiberg interrogé par Artsy, ce ne serait pas seulement l'affaire de pilleurs de temples souhaitant ainsi se prémunir de représailles divines, en détruisant leur pouvoir. Au vu des observations archéologiques et de la similitude des trous, ces destructions auraient été réalisées par des personnes "spécialement entraînées pour ce travail" à la demande de figures politiques ou religieuses désireuses de s'emparer du pouvoir.
Le but ? Renverser un ordre symbolique en "désactivant" le pouvoir divin. Aussi, au delà des motivations politiques, les dieux et pharaons égyptiens antiques, perçus comme des démons païens par les chrétiens, ont subi pléthore d'attaques de ces derniers, durant la période chrétienne en Égypte qui s'étend du Ier et le IIIe siècle après J-C. Détruire ces objets de cultes et d'adoration, revenait ainsi à couper le lien qui unissait les hommes à leurs dieux.
Une forme ancienne de "révisionnisme historique"
"Défigurer des statues d'anciens pharaons permettait aux nouveaux souverains de réécrire l'histoire à leur avantage, explique Edward Bleiberg. Le règne d'Hatchepsout a ainsi posé un problème pour la légitimité du successeur de Thoutmôsis III. Ce dernier a donc entrepris d'éliminer pratiquement toute représentation d'Hatchepsout", poursuit l'égyptologue pour qui cela s'apparente tout bonnement à "une forme ancienne "révisionnisme historique". Une pratique qui n'a par ailleurs jamais cessé dans l'histoire, rappelle-t-il. Selon GEO.fr