L'ancien général de Brigade français, Jean-Bernard Pinatel, révéle à Al-Ain News la stratégie française pour faire face aux Frères Musulmans

Dans une interview accordée au site d'actualité d' « Al Ain News » avec l'ancien chef du bureau Renseignement de la 11ème Division Parachutiste française Jean Bernard Pinatel qui nous a révélé la stratégie française pour faire face aux Frères Musulmans.
L'ancien Général au l’armée française Jean-Bernard Pinatel a estimé que la France envoyant sur la zone de conflit des navires de guerre et des avions rafales et en organisant des manœuvres avec les marines italiennes et grecques a clairement signifié sa détermination ce qui a fait reculer le président turc Recep Tayyip Erdogan, pour le moment.
Jean Bernard Pinatel, est un ancien Général chef du service d’information et des relations publiques de l’armée française, il est un des officiers à avoir accompli une double carrière militaire et civile de chef d’entreprise tout en effectuant parallèlement un parcours d’universitaire, d’enseignant et d’auteur.
Le Général de brigade a dirigé le Service d'informations et de relations publiques des armées (SIRPA), du 1er août 1985 au 20 septembre 1989. et l'ancien chef de section, commandant de compagnie puis chef du bureau Renseignement et Opérations de la 11ème Division Parachutiste. Il est aussi le Vice-Président de GEOPRAGMA.
Jean Bernard Pinatel a écrit plusieurs livres, comme, Histoire de l’Islam radical et de ceux qui s’en servent, Éditions Lavauzelle, Mai 2017. Et aussi un livre intitulé « Carnets de guerres et de crises », Éditions Lavauzelle, 2014.
Le site d'actualité d' « Al Ain News » a accordé une interview avec l'ancien officier de L'Armée français Jean Bernard Pinatel révèle la stratégie française au Méditerranée Oriental pour faire face les ambitions régionales d’Erdogan et les étapes du Paris pour lutte contre les Frères musulmans en France.
Quel est le rôle de la Turquie et du Qatar dans le soutien aux Frères musulmans de France?
Le rôle du Qatar est historiquement bien plus important que celui de la Turquie car ce pays a financé près de 500 mosquées et des centaines d’organisations des Frères Musulmans en France. Erdogan essaie de jouer avec la diaspora turque et notamment avec une minorité nationaliste, mais c’est marginal car la majorité des turcs sont bien intégrés en France, la preuve ils sont peu impliqués dans la délinquance.
Quel est le danger d'Islam politique sur la sécurité de la France?
C’est une menace majeure car par peur d’ostraciser la communauté musulmane et par calcul politicien, les différents Présidents et gouvernements mais aussi les Maires des grandes métropoles ont laissé la situation se dégrader depuis vingt ans. Mais la France est une nation qui vient du fond des âges pour plagier le général de Gaulle et cela fait plus de deux cents ans que les français sont attachés à la primauté de la Loi des hommes, laissant chacun se conformer ou pas à la Loi de Dieu et de ses messagers. De plus, depuis 2015, les attentats terroristes ont entrainé la mort de 300 français et françaises et ont fait prendre conscience qu’il est temps de réagir. Le Président Macron est le premier dirigeant français à proclamer clairement que l’ennemi est l’islamisme ou l’islam politique qu’il ne confond pas avec l’Islam.
Existent-t-ils des initiatives possibles présentées au ministère français de l’Intérieur pour protéger la France des cercles de l’islam politique qui nourrissent la haine et menacent la sécurité de la France?
La loi contre le séparatisme en discussion à l’Assemblée Nationale vise à renforcer les moyens de lutte. Ce n’est pas une question de moyens mais de volonté politique.
Quelles sont les initiatives prises pour expulser l'influence qatari de la France?
C’est un sujet beaucoup trop large pour être abordé rapidement dans une interview mais je peux vous dire que tous les responsables qui veulent servir et défendre la République sont aujourd’hui conscients du rôle néfaste du Qatar.
La question de l'islam politique sera-t-elle un dossier important lors des prochaines élections présidentielles françaises de 2022 ?
Cela dépendra de la situation sécuritaire dans les mois qui précèderont l’élection. Si les mesures actuelles prises par le gouvernement Macron, qui constituent des pas dans la bonne direction, entrainent une rupture de la dérive actuelle, ce sujet sera moins important. Mais si la dérive actuelle se prolonge, les français éliront quelqu’un d’autre.
Comment le Qatar et les Frères musulmans ont contribué au programme de la Turquie en Libye ?
Le point d’ancrage ce sont les milices turcophones et des Frères Musulmans de Misrata qui assurent aussi en partie la sécurité du gouvernement fantôme de Tripoli. C’est en armant ces milices et en les renforçant par des milices terroristes importées de Syrie et par des forces spéciales turques.
Quelle est la stratégie française pour faire face aux provocations militaires du président turc Recep Tayieb Erdogan au Méditerranée Oriental et ses ambitions régionales, surtout en ce qui concerne la théorie de la « patrie bleue » ?
Je ne peux vous répondre sur la stratégie au sens strict des mots mais je vais essayer de vous exposer pour quelles raisons la France s’oppose à Erdogan; Il y en a plusieurs qui s’ajoutent et se renforcent ce qui fait que la position française n’est pas conjoncturelle.
La première est qu’Erdogan se comporte comme un révisionniste du traité de Lausanne (24 juillet 1923), viole le droit international et ne respecte pas les décisions de l’ONU.
Dans le traité de Lausanne, la république turque, alliée de l’empire allemand durant la première guerre mondiale, acceptait les pertes territoriales de Chypre, dans le Dodécanèse, de la Syrie, de la Palestine, de la Jordanie, de l’Irak et de l’Arabie. Mais aussi Erdogan viole le droit maritime international en ne respectant pas les zones économiques exclusives (ZEE) qui découlent de ce traité. Et, enfin, les résolutions de l’ONU instituant un embargo sur les armes à destination de la Libye, Erdogan non seulement ne les respecte pas mais a engagé en Libye des milices terroristes en provenance de la région syrienne d’Ibid qu’il contrôle ainsi que des forces régulières turques et, de ce fait, menace la stabilité de tout le sahel francophone où vivent 93 millions d’africains.
Deuxièmement, par ses déclarations et ses actions, Erdogan menace deux pays qui font partie de l’Union européenne et, plus grave encore, qui sont membres de l’alliance militaire de l’OTAN dont il fait partie.
Troisièmement, il y a en France une passion pour la Grèce où notre civilisation démocratique prend ses racines et l’opinion française soutient la Grèce.
Quatrièmement comme l’Italie nous sommes des riverains de la méditerranée et nous sommes attachés diplomatiquement à ce que cette mer intérieure soit un lieu d’échange et de Paon pas d’affrontement.
En fin nous pouvons avoir une position dure car nous avons des forces aéronavales supérieures à celles d’Erdogan avec notamment nos avions rafales mais aussi nos sous-marins nucléaires d’attaque qui sont capables d’envoyer par le fond toute la flotte turque. Erdogan devrait se rappeler que nous l’avons déjà fait à Navarin en 1827 pour faire stopper les massacres des grecs, révoltés contre la sublime porte, par les soldats ottomans.
La France envoyant sur zone des navires de guerre et des avions rafales et en organisant des manœuvres avec les marines italiennes et grecques a clairement signifié sa détermination ce qui a fait reculer Erdogan… pour le moment.
Cette stratégie est-elle suffisante ou y a-t-il d'autres étapes, voyez-vous qu’il y aura une escalade entre l’Europe et la Turquie?
Il n’y aura pas d’escalade car Erdogan est totalement isolé dans sa dérive islamiste et pan-ottomane. Des voix s’élèvent à la chambre des représentants et au sénat américain pour exclure la Turquie de l’OTAN depuis qu’il a acheté les systèmes S400 à la Russie. De son côté Vladimir Poutine n’abandonnera jamais la Grèce orthodoxe quitte à perdre un client.
Par ailleurs, Erdogan est un Frère Musulman et il s’oppose les pays Arabes modérés dans la région comme l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et l’Egypte.
Même l’Union européenne, pourtant freinée par l’Allemagne qui s’agite en coulisse, se dit prête à sanctionner la Turquie, a annoncé le président du Conseil européen Charles Michel. "Nous avons tendu la main à la Turquie en octobre 2020 et notre évaluation est négative avec le constat de la poursuite des actes unilatéraux et de la rhétorique hostile. Nous aurons un débat lors du sommet européen le 10 décembre et nous sommes prêts à utiliser les moyens dont nous disposons" pour sanctionner cette situation, a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse. Il n’est plus guère soutenu et encore discrètement que par le Qatar qui a compris les risques qu’un appui trop voyant lui faisait courir.
Erdogan fera-t-il face à des problèmes pendant l'administration du président élu américain Joe Biden?
Biden va-t-il rester dans la ligne d’Obama ? Les Etats-Unis peuvent-ils choisir la Turquie et abandonner le pays modéré dans la région, je ne le pense pas. Même si Obama avait soutenu le Frère Musulman en Egypte, le contexte et les enjeux ont changé depuis qu’Erdogan a acheté le système de défense aérienne russe, la Turquie a été écartée du programme F15. De plus, Biden sera un Président américain sans grand pouvoir car il devra négocier en permanence avec le Sénat et la Cour suprême qu’il ne contrôle pas.