France: Fin du droit du sol à Mayotte .. pourquoi faut-il changer la Constitution ?
Afin de «couper l’attractivité» de l’archipel mahorais, le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé ce dimanche «la fin du droit du sol à Mayotte». Pour ce faire, l’exécutif envisage une «révision constitutionnelle».
Une mesure d’exception. Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a annoncé ce dimanche, en arrivant sur l’archipel français, «la fin du droit du sol à Mayotte».
Cette «mesure radicale» sera permise par une «révision constitutionnelle que choisira le président de la République», a précisé le locataire de la place Beauvau. Avant de trancher : «Il ne sera donc plus possible de devenir français, si on n'est pas soi-même enfant de parent français». L’objectif étant de «couper l'attractivité qu'il y a dans l'archipel mahorais ».
Mais est-ce possible ? «Oui», tranchent à l’unanimité les constitutionnalistes interrogés par Le Figaro. «Théoriquement, si vous révisez la Constitution, vous pouvez tout y mettre car cette dernière est considérée comme “la norme au-dessus de la hiérarchie des normes nationales”», explique d’emblée le maître de conférences en droit public Benjamin Morel.
Un statut déjà particulier
Mais pourquoi recourir à une telle démarche alors même que l’île de l’Océan indien a déjà un statut particulier ? «Nous avons en effet déjà singularisé Mayotte, en tant que département, via l’article 73 de la Constitution qui dispose que “si les lois et les règlements y sont applicables de plein droit, ces dispositions peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités”.» La singularité mahoraise tient notamment à sa proximité avec les Comores, situées à quelque 70 kilomètres de l'archipel et d’où vient une immigration clandestine très importante. À Mayotte, un habitant sur deux est étranger.
Depuis la loi Asile et Immigration de 2018, le droit du sol est déjà limité dans le 101° département français. Concrètement, il est exigé pour les enfants nés de parents étrangers à Mayotte, qu’au moins l’un de leurs deux parents ait, au jour de la naissance, résidé sur le territoire français depuis plus de trois mois et de manière régulière. Cette disposition particulière n’est valable nulle part ailleurs. «L’archipel a donc déjà un régime particulier avec une application du droit sur les sujets d’immigration qui y est singulière», clarifie le spécialiste Benjamin Morel, selon Le Figaro.
Constitutionnaliser pour sécuriser
La volonté de l’exécutif de passer par une révision constitutionnelle pourrait ainsi venir de sa conviction d’être «déjà allé loin en termes de torsions du droit», analyse Benjamin Morel. Et cela permettrait de «sécuriser» le régime particulier de l’archipel.
Les révisions constitutionnelles nécessitent toutefois une longue procédure car elles doivent être soumises à l’Assemblée et au Sénat avant d’être votées au 3/5ème par le Congrès. «Dans la configuration actuelle du Parlement, le vote de cette révision ne paraît pas simple», soutient ainsi le constitutionnaliste.