Gaz :Un nombre sans précédent de navires méthaniers aux portes de l'Europe
Des navires transportant du (GNL) attendaient, aux larges des côtes espagnoles et britanniques. Les installations européennes d'importation de GNL sont saturées alors que la demande a explosé pour remplacer le gaz russe à l'approche de l'hiver.
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C'est du jamais vu encore en Europe. « l'embouteillage inédit de navires méthaniers a mouillé l'ancre au large [du Vieux Continent] alors que la congestion des terminaux de regazéification et la flambée des prix compliquent davantage la situation de l'approvisionnement », constate Jacob Dick, du site spécialisé Natural Gas Intelligence, selon lesechos.
Cette semaine, au moins sept navires transportant du GNL attendaient au large de la côte sud-ouest de l'Espagne. Tandis que deux autres étaient ancrés près du terminal de Milford Haven, au Royaume-Uni, selon les données de suivi des navires de Bloomberg. Pis encore, une trentaine de méthaniers tourneraient au ralenti ou navigueraient lentement aux abords de l'Europe, en attendant de pouvoir décharger leur gaz, note le Wall Street Journal.
Des capacités mal réparties
Au total, le Vieux Continent dispose d'une trentaine de terminaux de regazéification pouvant recevoir du GNL. Une densité unique au monde mais qui n'a pas suffi à absorber l'explosion soudaine de la demande après la baisse des livraisons de gaz russe dans la foulée de la guerre en Ukraine.
Surtout, les capacités d'importation sont mal réparties. Elles sont abondantes au Royaume-Uni, en Espagne ou encore au Portugal, des pays peu dépendants de la Russie, et inexistantes en Allemagne ou dans certains pays d'Europe centrale - qui achètent massivement à Gazprom. Et même si Berlin, comme d'autres Etats-membres de l'Union, ont annoncé la construction de terminaux, ces derniers prendront plusieurs années à sortir de terre.
Ralentissement de la consommation
Par ailleurs, les prix du gaz ont explosé avec la guerre en Ukraine, contraignant les industriels européens à ralentir leur production pour ne pas voir flamber leur facture énergétique. Ils ont donc réduit leur consommation. Tandis que les températures encore clémentes pour la saison ont ralenti les besoins en gaz pour le chauffage des habitations en Allemagne, en France, en Italie ou encore en Espagne.
En conséquence, les réserves des pays européens restent bien remplies et ne peuvent absorber l'afflux de navires chargés de GNL. Les importations en Europe du nord-ouest et en Italie ont en effet atteint un total de 1,9 million de tonnes au cours de la semaine dernière, soit environ 58 % de plus qu'à la même période un mois plus tôt, selon Bloomberg.
Une attente fructueuse
Ce « bouchon » de navires méthaniers pourrait à terme jouer des tours à l'Europe. Si d'aventure les prix du GNL venaient à augmenter fortement en Asie, les traders ayant affrété les cargos pourraient décider d'envoyer leur cargaison là-bas. Mais les conditions de marché rendent cette éventualité peu probable, estiment les analystes. Car la ruée du Vieux Continent vers le gaz naturel liquéfié a fait bondir les coûts d'affrètement des navires. Dès lors, le trajet vers l'Asie et le retour vers les Etats-Unis d'où le GNL provient généralement coûterait très cher.
Par ailleurs, la demande en Asie reste pour l'heure modérée. La Chine n'ayant pas décidé d'assouplir ses restrictions en matière de Covid-19, freinant de la sorte la poursuite de la reprise de son industrie. Les besoins en gaz du pays sont ainsi moins importants qu'auparavant.
Enfin, la volatilité des prix de l'énergie en ce moment est si intense que les traders préfèrent attendre l'hiver pour vendre leur gaz, au moment où la demande devrait être la plus forte et fera donc augmenter les prix. Ils gagneraient ainsi plus d'argent à vendre leur chargement d'ici quelques mois que dans quelques semaines. Cette technique bien connue des pétroliers notamment s'appelle le « contango ».