L’Ukraine en quête d’influence pour peser sur la stratégie de Donald Trump

L’Ukraine refuse de céder après l’échange téléphonique entre Trump et Poutine. Elle s’efforce d’inscrire ses exigences dans les futures négociations, surtout l’obtention de garanties de sécurité solides pour empêcher toute nouvelle offensive russe.
En parallèle, Kiev plaide pour une implication européenne, alors que Trump semble vouloir marginaliser le Vieux Continent dans ce dossier.
Mercredi soir, lorsque l’ancien président américain a annoncé son appel à Vladimir Poutine et la tenue de négociations à venir, l’information est tombée en plein sommet à Paris réunissant les ministres des Affaires étrangères de six pays européens et de l’Ukraine. La surprise et la colère étaient palpables, confie-t-on. Et pour cause : ni Kiev, pourtant principal concerné, ni les Européens n’avaient été informés de cette initiative. Zelensky n’a été mis au courant qu’après coup, lorsque Trump l’a contacté après sa conversation avec Poutine. Une méthode brutale qui illustre le style direct et unilatéral du président américain dans ce second mandat.
Entre opportunités et menaces, une équation délicate pour Kiev
Après la stupeur, l’heure est désormais à l’analyse pour l’Ukraine. D’un côté, une issue redoutée ne s’est pas matérialisée : il n’y a pas eu de négociation secrète débouchant sur un accord imposé. Trump a proposé à Zelensky la mise en place de « groupes de travail » pour élaborer un plan de négociation, un sujet que le président ukrainien abordera lors de sa rencontre avec le vice-président américain JD Vance à Munich ce week-end. Officiellement, aucun projet finalisé n’existe encore, ce qui laisse une marge de manœuvre à Kiev.
Cependant, la menace demeure. Trump entend discuter directement avec Poutine du sort de l’Ukraine, dans une approche de dialogue entre « hommes forts ». Un face-à-face inquiétant, notamment si l’on considère le passif des rencontres entre les deux dirigeants, rarement à l’avantage des Américains.
Le spectre d’un accord précaire
La perspective d’un sommet en Arabie Saoudite, pays ami des deux présidents, alimente les inquiétudes ukrainiennes. Ce tête-à-tête pourrait déboucher sur un accord de paix sans garanties suffisantes pour Kiev, laissant la porte ouverte à une nouvelle offensive russe une fois les combats suspendus. Trump, désireux d’un succès diplomatique rapide pour en tirer des bénéfices politiques, semble prêt à négocier une sortie de crise expéditive. Or, son administration, notamment le secrétaire à la Défense Peter Hagseth, considère désormais que l’Europe n’est plus une priorité stratégique.
L’Ukraine face à un dilemme stratégique
Face à cette situation, Zelensky joue ses dernières cartes pour infléchir la position américaine. Il mise sur les dissensions à Washington, opposant les républicains sceptiques vis-à-vis du soutien à l’Ukraine à ceux qui restent attachés à l’héritage historique du parti. En signe de protestation, il a refusé de signer un accord économique présenté à Kiev par le secrétaire américain au Trésor sur l’exploitation des terres rares ukrainiennes, conditionnant son approbation à l’inclusion de garanties sécuritaires.
En parallèle, l’Ukraine tente de rallier l’Europe à sa cause, plaidant pour une participation active de ses alliés dans les négociations. L’Union européenne, mise à l’écart par Trump, se retrouve face à ses propres failles : faute d’avoir su bâtir cette « Europe puissance » tant évoquée, elle subit aujourd’hui les conséquences de son absence stratégique. Pourtant, elle a encore l’opportunité de peser sur l’issue des discussions et de redéfinir son rôle sur la scène internationale.
Un moment de vérité pour l’Ukraine et l’ordre mondial
L’Ukraine est donc à un tournant décisif, tout comme le reste du monde. Le plan de Donald Trump repose sur une diplomatie fondée sur la puissance américaine, reléguant les alliés européens à un statut secondaire. Face à cette reconfiguration, l’Europe doit choisir entre subir ou s’affirmer. La réponse qu’elle apportera, tout comme la stratégie que déploiera Zelensky, déterminera non seulement l’avenir du conflit, mais aussi celui des équilibres géopolitiques à venir.