Le Mali, le Burkina Faso et le Niger veulent des sanctions contre l’Ukraine
La tension grimpe encore d’un cran entre l’Ukraine et le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Les trois régimes alliés d’Afrique de l’ouest, dirigés par des militaires arrivés au pouvoir après des coups d’État, ont appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à « prendre les mesures appropriées » contre l’Ukraine qu’ils accusent de soutenir des groupes rebelles dans le nord du Mali, dans une lettre ouverte, rapporte l'AFP.
Début août, le Mali et le Niger ont rompu leurs relations diplomatiques avec l’Ukraine après une lourde défaite fin juillet de l’armée malienne et de son allié russe, le groupe paramilitaire russe Wagner, également déployé en Ukraine, lors de combats avec des séparatistes et des terroristes.
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Un responsable du renseignement militaire ukrainien, Andriï Ioussov, avait sous-entendu que Kiev avait fourni des informations aux rebelles pour qu’ils puissent mener à bien leur attaque, des propos qui avaient ensuite été partagés par l’ambassadeur ukrainien au Sénégal, déclenchant la colère de Bamako et de ses alliés.
« Apologie par les autorités ukrainiennes du terrorisme »
« Ces affirmations, qui sont d’une extrême gravité, dépassent le cadre de l’ingérence étrangère, condamnable en soi. Il s’agit d’un soutien officiel et sans équivoque du gouvernement ukrainien au terrorisme en Afrique, particulièrement au Sahel », déclarent ainsi dans cette lettre ouverte diffusée mardi soir les ministres des Affaires étrangères des trois pays, auprès desquels l’influence russe gagne du terrain depuis l’installation de régimes militaires à leur tête.
« Nous condamnons fermement l’agression et l’apologie par les autorités ukrainiennes du terrorisme, que rien ne saurait justifier », écrivent-ils également. Ils demandent en outre au Conseil de sécurité de « prendre ses responsabilités face au choix délibéré de l’Ukraine de soutenir le terrorisme », et plus largement de « prendre les mesures appropriées contre ces actions subversives qui renforcent les groupes terroristes en Afrique et constituent la manifestation de l’implication de sponsors étatiques étrangers dans l’expansion du terrorisme dans la région ».
Début août, le Mali avait déjà estimé que les propos d’Andriï Ioussov trahissent « l’implication de l’Ukraine dans une attaque lâche, traître et barbare (…) et constituent un soutien au terrorisme international », allant jusqu’à affirmer « adhère (r) totalement au diagnostic » de Moscou sur « la nature néonazie et scélérate des autorités ukrainiennes », des allégations infondées de la Russie, tout en assurant garder une « position de neutralité » sur le conflit en Ukraine.
Le Niger lui avait emboîté le pas, en indiquant lui aussi cesser ses relations diplomatiques avec l’Ukraine, fustigeant des propos « les propos subversifs et inacceptables » d’Andriï Ioussov.
Il avait aussi annoncé « la saisine du Conseil de sécurité des Nations unies en vue de statuer sur l’agression ukrainienne ». Peu après, Moscou en avait profité pour accuser Kiev, « incapable de vaincre la Russie sur le champ de bataille » selon lui, d’ouvrir « un deuxième front » en Afrique en soutenant « des groupes terroristes dans des États du continent favorables à Moscou ».
Une décision « précipitée » pour Kiev
La diplomatie ukrainienne avait quant à elle rejeté fermement les accusations du Mali et assuré qu’elle adhérait « inconditionnellement » aux normes du droit international, regrettant une décision « précipitée » des régimes militaires malien et nigérien de rompre ses relations avec elle. Kiev « se réserve le droit de prendre toutes les mesures politiques et diplomatiques nécessaires en réponse aux actions inamicales », selon le ministère ukrainien des Affaires Étrangères.
Une source sécuritaire occidentale a confirmé à l’AFP l’existence de contacts entre les autorités militaires ukrainiennes et les séparatistes maliens. Cette source n’a pas été en mesure de préciser la nature exacte du soutien éventuel de Kiev aux séparatistes, tout en excluant a priori une présence ukrainienne sur le terrain.
Ces dernières années, la Russie a intensifié ses efforts diplomatiques en Afrique, de façon à concurrencer les Occidentaux dans des pays qui sont traditionnellement leurs alliés.
La junte au Mali avait rompu en 2022 l’alliance ancienne avec la France et ses partenaires européens, pour se tourner militairement et politiquement vers Moscou. Elle a fondé avec le Burkina Faso et le Niger la nouvelle confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES).