Malgré les propos "antisémites" du rappeur Médine, les Verts maintiennent l'invitation à leur université d'été
xLe rappeur est accusé d'antisémitisme, d'homophobie et de communautarisme. Le gouvernement a appelé LFI et EELV à ne plus l'inviter.
Le parti Europe Ecologie-Les Verts reste déterminé à accueillir le rappeur Médine à son université d'été.
Les écologistes ont balayé vendredi 11 août les pressions qui s'accroissent sur eux comme sur La France insoumise (LFI) pour déprogrammer des débats avec l'artiste accusé d'antisémitisme, d'homophobie et de communautarisme.
Le parti écologiste a invité Médine à un débat le 24 août au Havre. Il sera aussi convié aux réunions de rentrée du mouvement de Jean-Luc Mélenchon, le 26 août, dans la Drôme.
Face à la polémique qui enfle, la cheffe de file d'EELV, Marine Tondelier, a souligné dans un entretien à l'AFP l'évolution et le parcours d'une personnalité qui a "ouvert les yeux sur ses erreurs" au fil des années.
"La question de la lutte contre les intolérances (...) passe forcément par des gens qui ne savaient pas et qui ouvrent les yeux, qui se déconstruisent, se conscientisent, qui reconnaissent des erreurs passées, qui avancent", a-t-elle ajouté.
Des critiques formulées dès les invitations lancées
Dès ces invitations lancées fin juillet, les critiques ont fusé contre les deux partis de gauche.
L'artiste est en effet précédé d'une réputation sulfureuse, entretenue par certains gestes et propos, à commencer par la "quenelle", posture antisémite popularisée par l'humoriste Dieudonné, que Médine a réalisée à plusieurs reprises il y a une dizaine d'années.
Celui qui a grandi au Havre s'est toujours défendu d'être antisémite, sans pour autant revenir sur ses gestes ou ses déclarations les plus controversés.
Pourtant, un post publié jeudi par Médine sur le réseau X (ex-Twitter) a déclenché une nouvelle salve de messages indignés, jusque chez des membres du gouvernement, comme la secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté, Sonia Backès, et le ministre des Transports Clément Beaune, figure de l'aile gauche de l'exécutif.
Médine y qualifiait l'artiste et essayiste franco-gambienne Rachel Khan, juive et petite-fille de déporté, de "resKHANpée" et la décrivait comme une personne "dérivant chez les social traîtres et bouffant au sens propre à la table de l'extrême-droite".
Le jeu de mots est "abject", a tonné Clément Beaune, appelant LFI et Marine Tondelier à "revenir à la raison" et à déprogrammer Médine.
Une provocation comparable au "Durafour crématoire" lancé dans les années 1980 par Jean-Marie Le Pen à l'encontre du ministre de la Fonction publique de l'époque, Michel Durafour, selon une vingtaine de députés du parti présidentiel Renaissance.
"Attaque antisémite indéniable et intolérable"
"L'allusion aux rescapés des camps de la mort et la mise en évidence du patronyme juif en fait une attaque antisémite indéniable et intolérable", écrivent ces parlementaires dans un communiqué commun, appelant "fermement" à désinviter le rappeur.
Accusés par la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra) d'"ambiguïtés trop récurrentes" sur l'antisémitisme, les Verts insistent sur l'importance de maintenir le dialogue avec tout le monde.
"Pour moi, la lutte contre l'antisémitisme, c'est une bataille culturelle qu'il faut mener et qui doit se mener partout et tout le temps, y compris là où c'est plus difficile ou plus risqué", dit Marine Tondelier.
"Je ne connais ni le rappeur Médine, ni Rachel Khan. Mais le 'jeu de mots' publié sur elle est scandaleux – au-delà de la limite malgré ce qu'il prétend", a répliqué le président de la Cour des comptes et ancien ministre socialiste Pierre Moscovici sur le réseau X.
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"Maintenir Medine après ce jeu de mots antisémite sur Rachel Khan serait cautionner cette ignominie", renchérit le président des Républicains, Eric Ciotti.
Lui aussi sous la pression, Médine a dû présenter ses regrets.
"La formule pas adaptée, qui a certainement dû heurter des personnes et je m'en excuse, n'était pas dirigée vers sa famille, ni vers les victimes du drame de la Shoah", a-t-il posté sur X vendredi.
Le ministre de l'Industrie renonce à participer aux journées d'été d'EELV
Habitué des réseaux sociaux, le rappeur y est régulièrement confronté à ses prises de position passées, mais aussi aux paroles de certaines chansons, vues comme hostiles à la laïcité, proche des idées islamistes ou encore homophobes.
Dans l'une de ses dernières interviews, dans la revue anticapitaliste Ballast datée du 15 juillet, l'artiste dit s'opposer à toute forme de discrimination, appelant de ses vœux "la justice sociale", le combat contre "l'extrême droite" et la fin des "mécanismes d'oppression qui frappent à la fois les populations LGBT, les racisés, les féministes".
Le ministre de l'Industrie Roland Lescure a de son côté a annoncé samedi qu'il renonçait à se rendre aux journées d'été d'Europe Ecologie-Les Verts en raison de la présence du rappeur, dont il a condamné les propos "sans ambiguïté de nature antisémite".
"Une seule décision s'imposait : ne pas y aller", a-t-il déclaré dans un entretien au Parisien.
Féru de débats avec des opposants au macronisme, Roland Lescure critique également la position de la secrétaire nationale des écologistes, Marine Tondelier, qui a maintenu l'invitation du rappeur à un débat le 24 août au Havre intitulé "La force de la culture face à la culture de la force".
"Ce qui me conduit à annuler ma présence, c'est justement que Marine Tondelier, qui se dit cheffe d'un parti républicain, a décidé, malgré ce tweet, de maintenir son invitation", explique-t-il.
"Moi, je suis prêt à parler avec tout le monde à condition que l'on respecte la loi et la décence minimale", ajoute le ministre. Également invité, l'ancien Premier ministre Édouard Philippe, maire du Havre, n'a pas pris position.