Procès du détournement de fonds : Marine Le Pen et le RN devant la justice
Le tribunal correctionnel de Paris ouvre lundi le procès de Marine Le Pen, de 24 autres individus et du Rassemblement national (ex-Front national) pour des allégations de détournement de fonds du Parlement européen afin de rémunérer des employés du parti.
Cette affaire revêt une grande importance politique pour la figure de proue de l'extrême droite.
Le lundi 30 septembre marque le début du procès des assistants des eurodéputés du FN. Marine Le Pen, Louis Aliot, Bruno Gollnisch, et Julien Odoul, entre autres, comparaissent devant le tribunal correctionnel de Paris pour répondre aux accusations de détournement de fonds du Parlement européen pour payer les salariés du parti.
Neuf anciens eurodéputés du FN, dont Marine Le Pen et des personnalités clés telles que Louis Aliot, Bruno Gollnisch, ainsi que le député et porte-parole du RN Julien Odoul, seront présents.
En plus de ces personnalités, douze anciens assistants parlementaires et quatre collaborateurs du parti seront également jugés au cours de ce procès, qui est prévu pour durer trois demi-journées par semaine jusqu'au 27 novembre.
Marine Le Pen a exprimé son intention de se présenter devant les juges autant que possible, mais elle pourrait faire l'impasse mardi pour assister à la déclaration de politique générale du nouveau Premier ministre Michel Barnier à l'Assemblée nationale.
Des "assistants" qui peinent à décrire leurs tâches
"Marine Le Pen a choisi d'être très présente dans ce procès. Certains disent 'elle va se cacher, elle ne viendra pas'. Non, pas du tout. Ce n'est pas le genre de la maison", a assuré dimanche sur RTL le député RN Sébastien Chenu, promettant que la cheffe de file du parti d'extrême droite avancerait "un certain nombre de nouveaux éléments".
L'affaire a débuté en 2015 par un signalement du président du Parlement européen Martin Schulz et concerne de très nombreux contrats d'attachés parlementaires sur une période de plus de dix ans (2004-2016).
Pour l'accusation, ces "assistants", bien en peine de décrire leurs tâches, n'en avaient que le titre. Certains n'avaient jamais même rencontré leur employeur officiel ou mis les pieds au Parlement et ne travaillaient, selon l'accusation, que pour le parti – ce qui est interdit dans la réglementation européenne.
Il s'agit notamment du garde du corps historique du fondateur du FN Jean-Marie Le Pen, Thierry Légier, de sa secrétaire, de la cheffe de cabinet de Marine Le Pen, Catherine Griset, ou encore du graphiste du parti.
"Marine, serait-il possible que je vienne à Strasbourg demain pour voir comment se déroule une session" au Parlement, "et faire la connaissance de Mylène Troszczynski à qui je suis rattaché ?", écrivait Julien Odoul en février 2015, soit quatre mois après le début de son contrat d'assistant parlementaire de Mylène Troszczynski. "Oui bien sûr", avait répondu Marine Le Pen.
Les prévenus, jugés notamment pour détournement de fonds publics ou complicité de ce délit, encourent un maximum de dix ans d'emprisonnement et un million d'euros d'amende et, surtout, une peine d'inéligibilité de dix ans susceptible d'entraver les ambitions présidentielles de Marine Le Pen pour 2027.
"Mais il n'y a pas de raison qu'elle soit déclarée inéligible puisque François Bayrou, poursuivi pour les mêmes faits, président de parti politique lui aussi, a été relaxé. Donc ce qui vaut pour l'un devrait valoir pour l'autre", veut croire Sébastien Chenu.
La plupart des prévenus contestent en bloc, évoquant une "mutualisation" du travail des assistants parlementaires. Le RN dénonce depuis des années un "acharnement", voire une procédure "politique".
"Un véritable système" mis en place par le RN ?
"Nous n'avons rien à nous reprocher dans cette affaire", déclarait dans Le Parisien mi-septembre Marine Le Pen, 56 ans, disant tenir à expliquer à la barre que les assistants parlementaires ne sont "pas des salariés du Parlement européen" et ont "évidemment vocation, pour un certain nombre d'entre eux, à faire de la politique".
"Ce n'est pas un procès politique car les juges ne font pas de politique, mais c'est un règlement de compte politique de la majorité du Parlement européen", abonde auprès de l'AFP Me Alexandre Varaut, avocat et eurodéputé RN.
Le Parlement européen, partie civile, a évalué son préjudice financier à trois millions d'euros. Il ne réclamera que deux millions, un million ayant déjà été remboursé – ce qui n'est pas un aveu de culpabilité, a assuré le RN.
Le parquet de Paris a évoqué en septembre 2023 "un véritable système mis en place pour faire supporter, par le Parlement européen, une partie des charges de fonctionnement du FN via la prise en charge des salaires d'un nombre croissant de ses employés".
Ce "système", validé par Jean-Marie Le Pen puis sa fille, selon l'accusation, se serait accéléré avec l'entrée au Parlement en 2014 de 23 eurodéputés FN – contre trois auparavant.
Jean-Marie Le Pen, 96 ans, ne comparaîtra pas, une expertise ayant déterminé qu'il n'était pas "en état" d'être jugé pour des raisons de santé, comme l'ex-eurodéputé Jean-François Jalkh.
Avec AFP