Népotisme au Burkina Faso : Les liens familiaux et amicaux au cœur du pouvoir
La situation politique au Burkina Faso s'assombrit alors que la junte au pouvoir, issue du coup d'État de septembre-octobre 2022, se retrouve sous le feu des critiques pour son apparente propension au népotisme.
Les multiples nominations de membres de la famille présidentielle et d'amis proches à des postes clés du gouvernement soulèvent des préoccupations quant à la transparence et à l'équité dans la gestion du pays. Cette tendance inquiète davantage dans le contexte régional marqué par des coups d'État successifs et des tensions anti-françaises au Burkina Faso, au Mali, et au Niger, ainsi que la situation sécuritaire précaire dans la région du Sahel.
Le général (2S) Dominique Trinquand souligne que «ce népotisme est la résultante des échecs des systèmes politiques antérieurs. Les déceptions liées à ces systèmes ont créé un désenchantement et ont ouvert la voie à ces juntes militaires. Il y a aujourd’hui une croyance qu'ils sont un moindre mal par rapport à leurs prédécesseurs.»
Sur le plan plus pratique, le pouvoir au Burkina Faso cherche surtout à se renforcer à travers ces pratiques népotiques. En effet, dans un contexte d’instabilité politique et sécuritaire, avec une situation qui se dégrade de jour en jour, «les seuls à qui ce pouvoir peut faire confiance sont la famille et les amis.» Ce constat du général Trinquand trouve écho dans la situation burkinabè actuelle, où les nominations au sein du gouvernement semblent être basées sur des liens familiaux et amicaux, accentuant ainsi le risque de népotisme.
Le président de la transition ibrahima Traoré s'appuie donc sur ses proches pour consolider son pouvoir. Les amis sont le prolongement de la famille. Le capitaine Anderson Martha Céleste Anderson Medah, ami d'enfance du président, occupe le poste stratégique de directeur de cabinet, devenant ainsi le point central pour les principaux dossiers de l'État.
De même, le capitaine Oumarou Yabr, directeur général de l'Agence nationale de renseignement (ANR), et le capitaine Farouk Azaria Sorgho, porte-parole du Mouvement patriotique pour la sauvegarde de la partie II (MPSR II), sont tous deux des amis d'enfance du président et occupent des positions clés. Cette proximité entre le président et ses amis d'enfance accentue les préoccupations du général Trinquand quant à l'influence népotique au sein du gouvernement.
Herman Yacouba Nacambo, magistrat et proche d'Inoussa Traoré, a été nommé directeur général de la Caisse nationale de la sécurité sociale (CNSS), accentuant ainsi le réseau d'influence qui s'étend au-delà des liens familiaux. Ces nominations suscitent des inquiétudes quant à la gouvernance démocratique, l'équité et la transparence, des préoccupations également soulignées par le général Trinquand.
Le général Trinquand ajoute que «au Burkina Faso, la situation est encore différente du Mali et du Niger, il y a une croyance dans une nouvelle ère «Thomas Sankara.» Cette référence à Thomas Sankara, souvent associé à des principes socialistes et anti-impérialistes, souligne un désir de rupture avec les pratiques politiques passées et peut influencer la perception du népotisme dans le contexte actuel.
Ainsi, les nominations au sein du gouvernement, où des membres de la famille présidentielle occupent des postes clés, soulèvent des inquiétudes quant à l'équité et la diversité au sein des institutions gouvernementales. Le général Trinquand met en garde contre les conséquences de cette concentration du pouvoir au sein d'une même famille, soulignant que «cela a pour conséquences une plus grande fragilité politique.»
Alors que la junte au pouvoir s'appuie sur des liens familiaux et des amitiés de longue date pour consolider son emprise, les conséquences pour la stabilité et la confiance du peuple burkinabè sont potentiellement dévastatrices.
Dans le contexte des coups d'État successifs et des tensions anti-françaises dans la région, cette situation pourrait également aggraver les relations internationales du Burkina Faso et compromettre davantage la sécurité régionale. Il est impératif que la communauté internationale surveille de près l'évolution de la situation au Burkina Faso et encourage des réformes visant à garantir la bonne gouvernance et la représentation équitable au sein des institutions gouvernementales.