L’ancien ambassadeur français au Mali à Al-Ain news : « Sultan Al Jaber est une personnalité admirée. Il doit se focaliser sur ce point pour le climat en Afrique »
L’ancien ambassadeur français à Bamako (Mali), et d'autres pays africains, Nicolas Normand, a évoqué, dans un entretien exclusif avec Al Ain News, la question du changement climatique en Afrique et les démarches attendues de la COP28.
Q : L'Afrique est le continent le plus touchée par le changement climatique, la COP28 prévue aux Emirats en novembre pourrait-elle apporter un plus, sous la présidence de Sultan Al Jaber ?
Sur l'Afrique et le changement climatique, je crois que l'Afrique a un rôle à jouer important en matière de protection contre le changement climatique. C'est la préservation des forêts du bassin du Congo principalement. Il y avait ce sommet One Summit Forest à Libreville il y a quelques jours, où le président français était venu. Ça, c'est très important de préserver ces forêts qui sont très menacées. Et en fait, on parle beaucoup de la destruction de l'Amazonie avec l'ancien président Bolsonaro. Mais il est évident que l'explosion démographique qui se produit également au Congo, RDC, Congo Kinshasa menace beaucoup la forêt du bassin du Congo. Donc, il faut une action pour préserver ces forêts.
Oui, je pense que c'est cette personnalité et Emiratis est très respecté et admiré. C'est quelqu'un de très brillant d'après ce que tous les experts me disent. Donc il faut qu'il mette en avant aussi la question de la préservation des forêts. Et il y a les deux plus grands bassins forestiers du monde sont l'Amazonie et le Congo. En Afrique, ce n'est pas évidemment le seul élément. Bien entendu, il faut que les émissions de carbone soient réduites, qu'il y a une véritable transition énergétique.
Normalien, ingénieur agronome et énarque, ancien diplomate (ministre plénipotentiaire), Nicolas Normand a consacré l’essentiel de sa carrière à l’Afrique subsaharienne : sur le terrain en Afrique du Sud et, en tant qu’ambassadeur, au Mali, au Congo, au Sénégal et en Gambie ; au Quai d’Orsay en tant que rédacteur pour la Corne de l’Afrique, conseiller au cabinet du ministre des Affaires étrangères pour l’Afrique, sous-directeur des affaires politiques.
Mais ça, c'est hors de l'Afrique. En Afrique, l'Afrique n'est pas un polluant en ce sens qu'elle est, mais peu de gaz à effet de serre. Mais en revanche, elle absorbe beaucoup de gaz à effet de serre par ces forêts. Donc c'est une action de prévention et une action curative. Pour l'Afrique, il faut surtout préserver les forêts. Il faut pour cela que l'Afrique reçoive une certaine aide des pays occidentaux et il faut aussi, ça fait partie quand même du changement climatique. Il faut traiter le problème démographique. En Afrique, au sud du Sahara, actuellement, il y a 1200000000 d'habitants et en 2100 et il est prévu autour de 5 milliards d'habitants.
Il faut rappeler qu'en 1900 et avec 100 millions d'habitants en Afrique au sud du Sahara, donc la population de 1900 à maintenant a été multipliée par douze et elle risque d'être multipliée par quatre ou cinq encore d'ici la fin du siècle. Et actuellement, 17 % de la population mondiale vit en Afrique. À la fin du siècle, 40 % de la population mondiale sera en Afrique. Et donc cette question est liée aux changements climatiques. Ils vont souffrir du changement climatique, d'une part, mais surtout ils vont aggraver la question du changement climatique, parce que 5 milliards d'habitants, ça va détruire les forêts, ça va détruire l'environnement, ça va créer des catastrophes humanitaires, probablement des problèmes sécuritaires aussi, et ça va concourir quand même à la dégradation générale. Et ça n'ira pas dans le sens souhaité de préservation ou de réduction du changement climatique.
Un mot à Sultan Al Jaber concernant l’environnement en Afrique !
Je lui dis que, en ce qui concerne l'Afrique, il y a deux éléments importants concernant le changement climatique. C'est de préserver les forêts, en particulier du bassin du Congo. Prévoir une aide à ce domaine, ne pas se désintéresser de cette question et aussi traiter la question de l'explosion démographique.
La meilleure manière de traiter la question de l'explosion démographique, c'est de promouvoir l'école pour les filles parce que beaucoup de filles quittent l'école très tôt, dès la fin de l'école primaire et donc se marient très jeunes, ne sont pas éduquées. Et donc, si on améliore le statut des femmes en Afrique, ça permettra de réduire la l'explosion démographique à un taux raisonnable. Ça sera favorable au développement économique de l'Afrique et ces jeunes femmes auront un meilleur statut social et participeront aussi au développement économique de l'Afrique. Et donc ça permettra de réduire la pauvreté. La pauvreté en Afrique est une cause de destruction de l'environnement et il est important de résoudre ce problème de retard du développement économique de l'Afrique.
Je pense que le principal facteur qui explique le retard de développement en Afrique, c'est l'éducation. L'éducation est très peu développée en Afrique, il y a des riches, enfin, ça dépend des pays. Bien sûr. Le Kenya a résolu ce problème par exemple. Mais au Sahel, plus de la moitié des enfants ne vont pas du tout à l'école. Donc il y a un problème majeur de l'éducation et l'éducation des filles aura un effet sur la démographie, aura un effet sur la protection de l'environnement et donc aura un effet indirect sur le climat. Et donc je crois qu'en mettant l'accent sur la protection des forêts, sur le développement de l'éducation, on peut freiner le changement climatique en Afrique.