Sabotage d'un oléoduc au Niger par les rebelles : lutte d'influence internationale (experts)
Les autorités nigériennes ont confirmé le 22 juin qu'une partie d'un oléoduc transportant du pétrole brut vers le Bénin avait été intentionnellement sabotée par un groupe rebelle lors de la nuit du 16 au 17 juin.
La télévision publique Télé Sahel a rapporté que cet acte de sabotage a eu lieu dans le département de Tesker, situé dans le centre-est du Niger.
Le gouverneur de la région de Zinder, le colonel Issoufou Labo, s'est rendu sur les lieux de l'attaque et a déclaré : "D’ores et déjà, nous avons réuni des informations et des indices sur les présumés auteurs.
Tous ceux qui ont contribué vont être interpellés et jugés conformément à leur acte terroriste."
Le procureur de la République près du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme de Zinder, Ousmane Baydo, a confirmé l'ouverture d'une enquête sur cet incident.
Il a précisé que le Front patriotique de libération (FPL), un mouvement rebelle, avait revendiqué cet acte de sabotage visant à perturber l'acheminement du pétrole brut vers le Bénin.
Le FPL a été créé en août 2023 après le renversement du président Mohamed Bazoum par un coup d'État. Son leader, Mahamoud Sallah, avait justifié cette action par la volonté de libérer le président déchu et avait menacé de cibler des installations pétrolières pour faire entendre leur revendication.
L'acte de sabotage a provoqué des dommages importants à l'oléoduc, entraînant une fuite de brut qui a été décrite comme une "marée noire" s'étendant sur plus de 370 mètres à travers la brousse. Des images diffusées par Télé Sahel montrent des cadavres d'oiseaux et une végétation affectée par cette catastrophe environnementale.
L'oléoduc, long de près de 2 000 km, joue un rôle crucial dans l'économie du Niger et du Bénin, transportant le pétrole de l'Agadem, dans le nord-est nigérien, jusqu'au port de Sèmè-Kpodji au Bénin. Cette infrastructure est stratégique pour les deux pays, qui collaborent avec la China National Petroleum Corporation (CNPC) et l'entreprise chinoise Wapco.
Cependant, l'oléoduc est également devenu une source de tension diplomatique entre le Niger et le Bénin depuis le coup d'État, illustrant les défis sécuritaires et économiques auxquels la région est confrontée.
Le doyen de la Faculté des études supérieures et de la recherche scientifique à l'Université islamique du Niger et écrivain spécialisé sur l'Afrique de l'Ouest, le Dr Ali Ya'qub, a directement accusé des puissances occidentales, notamment la France.
Ya'qub a déclaré à "Al-Ain News": "Je crois que des pays occidentaux sont derrière ces événements (les attaques des rebelles), envoyant un message aux autorités selon lequel elles ne pourront pas défendre leur propre existence. Qui soutient ces personnes ? Où ont-elles trouvé leurs armes ? Qui les finance ?"
De son côté, Omar Al Ansari, cadre du Parti du Renouveau Démocratique et Républicain au Niger, a estimé que "les rebelles pensaient que les revenus pétroliers attendus étaient la principale raison derrière la destitution de Bazoum, et c'est pourquoi ils ont choisi de perturber l'exploitation de ces revenus."
Al Ansari a déclaré à "Al-Ain News" que les rebelles nient tout lien avec l'étranger, mais que, que cela soit vrai ou non, ils appellent le gouvernement (les autorités militaires) à annoncer un calendrier pour la transition, permettant au peuple d'élire légitimement ses représentants.
Le journaliste mauritanien spécialisé en Afrique de l'Ouest, Abdullahi Mbati, a lié la décision des autorités militaires au Niger de retirer les bases militaires américaines du pays au retour de l'ancienne rébellion appelant à la séparation du nord et du sud.
Il a expliqué que l'accusation des autorités militaires d'implication américaine dans la rébellion manquait de preuves, mais l'existence américaine a certainement été une garantie de stabilité au Niger, et son absence a contribué au retour de la rébellion.
Le régime militaire au pouvoir au Niger a "immédiatement" annulé le 16 mars dernier un accord de coopération militaire conclu en 2012 avec les États-Unis.