France : Macron face à un “délicat exercice d’équilibriste”
Dégradations de bâtiments publics, pillages et échauffourées ont secoué jeudi de nombreuses villes de l’Hexagone pour la troisième nuit consécutive après la mort mardi à Nanterre de Nahel.
Pour la presse internationale, cette explosion de violences place le président français dans une position difficile.
421 interpellations à travers l’Hexagone, des unités d’intervention d’élite comme le Raid et le GIGN et la BRI déployées dans plusieurs villes du territoire, de nombreuses échauffourées et des scènes de pillage de magasins… Pour la troisième nuit consécutive après la mort de Nahel mardi à Nanterre, de nouvelles violences urbaines ont “secoué” le pays jeudi 29 juin, rapporte le Daily Mail. Ni la mise en examen et le placement en détention provisoire du policier mis en cause, ni la mobilisation de quelque 40 000 forces de l’ordre, n’auront suffi à calmer les émeutiers, selon courrierinternational.
À Nanterre, devenue épicentre des violences, des fusées d’artifices et des grenades ont éclaté dans le quartier populaire de Pablo Picasso où vivait l’adolescent tué. Dans le centre-ville de Marseille, c’est la devanture de la bibliothèque municipale de l’Alcazar qui a été endommagée, selon la mairie. À Paris, plusieurs boutiques ont été vandalisées et pillées. En Seine-Saint-Denis, “quasiment toutes les communes” ont été touchées, souvent des actions éclair, de nombreux bâtiments publics pris pour cible comme la mairie de Clichy-sous-Bois et des commerces pillés, selon une source policière.
Face à l’explosion des violences urbaines à travers l’Hexagone, voilà donc Emmanuel Macron “contraint à un délicat exercice d’équilibriste”, analyse le New York Times. Le président “veut réprimer les protestations avant qu’elles ne se propagent davantage et ne renversent ses efforts visant à rétablir un sentiment de calme […] après les turbulences déclenchées par la réforme des retraites”, souligne le quotidien américain. Mais “si les mesures qu’il prend pour arrêter les manifestations sont trop draconiennes, elles ne peuvent qu’alimenter la colère contre les violences policières”.
Pour le correspondant du Standard à Paris Stefan Brandle, “ce qui rend les choses plus difficiles aujourd’hui, c’est que, contrairement” aux émeutes de 2005, “une vidéo circule qui laisse peu de place au doute”. Elle montre le tir à bout portant du policier sur l’adolescent. “Dans les banlieues françaises, son impact émotionnel est aussi grand que la vidéo de la mort de George Floyd, qui a conduit au mouvement Black Lives Matter aux États-Unis en 2020 […]. Le président Macron envoie chaque nuit davantage de policiers antiémeutes dans les banlieues. Les perspectives ne sont pas bonnes”, conclut le journaliste du quotidien autrichien.
Pour l’instant, “l’état d’urgence, réclamé par le leader de la droite Eric Ciotti et par l’extrême droite”, a été “écarté”, rappelle Le Soir. Mais l’amplification des violences pourrait-elle faire changer d’avis le gouvernement ? s’interroge notamment La Repubblica qui qualifie la situation en France de “guérilla”.
En 2005, “la mort de deux jeunes poursuivis la police à Clichy avait provoqué 21 jours consécutifs de violences et d’affrontements, forçant le gouvernement de droite à approuver un couvre-feu”, rappelle le quotidien italien. Alors que la “France bouillonne”, “en coulisses, c’est une mesure extrême qui n’est plus à exclure”, note La Repubblica. “Voyons comment se passe la nuit prochaine” a confié au journal une source au ministère de l’Intérieur.