Organisation de l'Islam en France : Défis et Relations avec l'État
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Les obstacles à l'organisation de l'Islam en France et les relations du Conseil français du culte musulman avec les présidents de la République.
L'organisation de l'Islam en France a toujours été un sujet sensible, marqué par des tensions politiques, des influences étrangères et des divergences internes au sein des instances musulmanes.
Le Conseil français du culte musulman (CFCM), créé en 2003 sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy alors ministre de l'Intérieur, est censé incarner un interlocuteur privilégié entre l'État et les musulmans de France. Toutefois, il a souvent été critiqué pour ses difficultés à s'imposer comme une structure représentative et unifiante.
Les obstacles à une organisation stable de l'Islam en France
Plusieurs obstacles entravent l'organisation d'un Islam de France pleinement autonome :
L'influence des pays étrangers : Pendant longtemps, les principaux acteurs du culte musulman en France étaient soutenus par des puissances étrangères (Maroc, Algérie, Turquie, etc.), ce qui a créé des divisions internes et freiné l'émergence d'une gouvernance indépendante.
L'absence d'une formation locale des imams : La plupart des imams exerçant en France sont formés à l'étranger, ce qui complique l'adaptation à la laïcité et aux valeurs de la République française.
Les divergences entre les différentes tendances de l'Islam : La communauté musulmane en France est marquée par une grande diversité ethnique, culturelle et doctrinale, rendant difficile l'émergence d'une structure unique et consensuelle.
Les préoccupations politiques et sécuritaires : Depuis les attentats terroristes de 2015, l'État français a renforcé son contrôle sur les mosquées et les associations religieuses, ce qui a parfois créé des tensions avec les responsables du culte musulman.
La tentative du CFCM de se démarquer des Frères musulmans
La question de l'influence des Frères musulmans en France est un sujet récurrent dans le débat public. Le CFCM a souvent été accusé d'être sous l'influence de certaines tendances islamistes, notamment celles proches des Frères musulmans.
Pour tenter de rassurer l'opinion publique et les autorités, le Conseil a progressivement adopté une posture plus distanciée vis-à-vis de cette mouvance, notamment en excluant certains acteurs considérés comme trop proches de ce courant. Cependant, cette prise de distance reste un défi, car certaines structures affiliées au CFCM entretiennent encore des liens avec des réseaux islamistes.
L'évolution des relations entre le CFCM et les présidents français
Jacques Chirac (1995-2007)
Sous sa présidence, la question de l'organisation du culte musulman a été peu abordée directement. Toutefois, il a soutenu la création du CFCM sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy en 2003.
Nicolas Sarkozy (2007-2012)
Sarkozy a joué un rôle central dans la structuration du culte musulman en France, cherchant à intégrer les musulmans dans un Islam de France désengagé des influences étrangères. Cependant, son discours sur l'identité nationale et sa fermeté face à l'islamisme ont suscité des tensions avec certains responsables du culte.
François Hollande (2012-2017)
Son mandat a été marqué par les attentats terroristes de 2015 et 2016, qui ont entraîné une remise en question du rôle du CFCM. L'État a cherché à encadrer plus strictement les financements étrangers et à favoriser la formation des imams en France.
Emmanuel Macron (depuis 2017)
Macron a adopté une approche plus interventionniste en lançant en 2020 le projet du Conseil national des imams, censé remplacer progressivement le CFCM.
Il a aussi renforcé la lutte contre le "séparatisme islamiste", ce qui a suscité des critiques de certaines associations musulmanes. En 2021, plusieurs fédérations musulmanes ont quitté le CFCM, rendant son rôle encore plus incertain.
L'organisation de l'Islam en France reste un défi complexe, pris entre des enjeux politiques, sécuritaires et communautaires. Si le CFCM a été conçu comme un interlocuteur central, il peine à s'imposer face aux influences étrangères et aux tensions internes. Les présidents français successifs ont chacun tenté de restructurer l'Islam de France, mais sans réussir à instaurer une organisation stable et indépendante.
L'avenir de cette structuration reste incertain, alors que le gouvernement continue de renforcer son contrôle sur le culte musulman.