La « prime Macron » s’est en partie substituée au salaire, et pourquoi c’est fâcheux
Environ 30 % du montant des primes ont remplacé des hausses de salaire, a calculé l’Insee. Ceci, alors que les salaires peinent à suivre l’envolée de l’inflation.
« Les salaires ont moins augmenté au quatrième trimestre que ce qui aurait pu être ».
Dans sa dernière note de conjoncture, rendue publique mercredi 15 mars 2023, l’Insee met en lumière un des effets pervers de la « prime Macron », mise en place pour soutenir le pouvoir d’achat des Français.
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Ce que nous avons calculé, c’est que 30 % du montant de cette prime se serait substitué à du salaire mensuel de base , indique Julien Pouget, chef du département de la conjoncture de l’Insee. Autrement dit, 100 € de prime ont remplacé 30 € de hausses de salaire.
Un gain pour le salarié ?
Pas si sûr. Car contrairement au salaire, rien ne garantit qu’une prime sera reconduite d’une année sur l’autre – à moins qu’un accord d’entreprise le spécifie.
Les employeurs ont donc tout intérêt à privilégier cette « prime de partage de la valeur » (PPV) plutôt qu’une augmentation pérenne.
D’autant plus que, second avantage pour eux, elle est exonérée de cotisations sociales (dans la limite de 3 000 €, et même 6 000 € pour les entreprises ayant signé un accord d’intéressement).
Le salarié y trouve son compte à court terme, mais faute de cotisations, la prime ne rentre pas dans le calcul de ses droits à la retraite. La prime est aussi exonérée d’impôt sur le revenu pour les salariés gagnant jusqu’à trois fois le Smic.
Les versements ont été massifs fin 2022, avec de potentiels effets d’aubaine , commente l’Insee dans sa note de conjoncture.
Près de 5 millions de salariés ont perçu cette prime, soit 30 % de l’ensemble des salariés. Le montant moyen est de 806 € par bénéficiaire, pour un total de 4,4 milliards d’euros.
Les versements de PPV ont été particulièrement élevés au mois de décembre , observe aussi l’Insee.
« Le faible dynamisme des salaires de base au quatrième trimestre suggère l’existence d’effets d’aubaine : en l’absence du dispositif de PPV, des employeurs auraient sans doute versé, sous une forme différente, une partie du montant de la prime à leurs salariés. »
Cette part est estimée à environ 30 % ».
En moyenne, sur l’année 2022, les salaires ont augmenté de 5,7 % (l’Insee mesure le « salaire moyen par tête »).
Corrigé des effets de l’inflation, c’est tout de même une hausse réelle de +0,4 %.
Toutefois, cette hausse est due en partie à un moindre recours aux dispositifs de chômage partiel, comparé à l’année 2021.
Sans cet effet mécanique, et corrigé de l’inflation, les salaires réels ont reculé de 1,8 %. Un recul inédit depuis le début des années 1980 , commente l’Insee.