Sénégal : La controverse autour de la reconnaissance des Tirailleurs « Morts pour la France »
La France a récemment attribué le titre de « Morts pour la France » à six tirailleurs sénégalais, ivoiriens et burkinabés, tués le 1er décembre 1944 à Thiaroye, au Sénégal, pour avoir réclamé leur solde.
Cette décision, marquée par une reconnaissance mémorielle sans précédent, suscite une vive controverse : s’agit-il d’un acte de justice historique ou d’un geste symbolique insuffisant ?
80 ans après le massacre de Thiaroye, l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) a décerné ce titre à six tirailleurs, parmi lesquels quatre Sénégalais, un Ivoirien et un Burkinabé. Cette décision ravive un souvenir douloureux. En décembre 1944, plus d’une dizaine de tirailleurs ont été fusillés par des troupes coloniales françaises dans le camp militaire de Thiaroye près de Dakar, suite à une révolte contre l’absence de paiement de leur solde.
En 2012, François Hollande avait reconnu « la dette de sang » entre la France et plusieurs pays africains, dont le Sénégal. La présidente de l’Association pour la mémoire et l’histoire des tirailleurs sénégalais, Aïssata Seck, considère cette reconnaissance comme une étape importante vers une réconciliation historique. Cependant, Ousmane Sonko, premier ministre sénégalais, critique cette décision, la jugeant insuffisante et demandant une réévaluation des méthodes de reconnaissance et de réparation.
Le terme « tirailleurs sénégalais », utilisé depuis 1857, a souvent désigné l’ensemble des soldats africains servant dans l’armée française. Les demandes de pensions et la reconnaissance des sacrifices des tirailleurs sont des questions persistantes depuis des décennies.
Certaines voix, comme celle de Seydi Gassama, directeur d'Amnesty International Sénégal, jugent cette reconnaissance de six tirailleurs comme « ridicule » et « insultante » pour les autres victimes. Selon les historiens, environ 300 tirailleurs auraient été tués, alors que la France ne reconnaît pour l’instant que six victimes. Gassama appelle à des excuses officielles et à une investigation complète en collaboration avec les pays africains concernés.
La France promet de compléter la liste des tirailleurs reconnus dès que l'identité d'autres victimes sera établie. Toutefois, tant que la vérité sur les victimes et leurs lieux d’enterrement ne sera pas révélée, les frustrations perdureront, selon Amnesty International Sénégal.