Silvio Berlusconi : le Cavalier surgit dans la nuit
Décédé à l'âge de 86 ans ce lundi 12 juin, Silvio Berlusconi aura réussi à concentrer toute l’essence du football dans sa seule personne.
Mais s'il avait remis le pied à l'étrier du côté de Monza depuis 2018, Il Cavaliere restera à jamais lié à l'histoire de l'AC Milan. Pour le meilleur et pour le pire.
C’était l’une des activités préférées de Silvio Berlusconi : la vantardise, la vie considérée comme un éternel jeu de celui qui pisse le plus loin. Le nombre de ses conquêtes, ses scores aux élections, sa maison plus grosse que toutes les autres, ses entreprises toujours plus riches et écrasantes. Mais il ne faut pas s’avancer beaucoup pour se dire que son chiffre préféré devait sans doute être celui-ci : 28. Vingt-huit, comme le nombre de trophées qu’il a apportés – ou que lui ont apporté, l’un n’allait pas sans l’autre – à l’AC Milan. Vingt-huit titres, dont huit de champion d’Italie, cinq coupes d’Europe des clubs champions, deux coupes intercontinentales. Vingt-huit titres, et sept Ballons d’or. Du jamais vu dans l’histoire du foot pour un président de club, Florentino Pérez excepté, et encore. De telle sorte que lorsqu’on l’avait interviewé il y a quelques années, Zvonimir Boban, l’un des joyaux de du Milan, n’avait trouvé aucun mal à résumer l’affaire: « Le club est peut-être centenaire, mais en vérité, c’est comme s’il avait été fondé par Berlusconi ».
Wagner, Rossi et un champion de karaté
Une série de liftings en moins, une poignée de cheveux en plus, voici Silvio Berlusconi le 1er mars 1986. Il enfile un costume croisé, un manteau bleu, une écharpe blanche, sort de chez lui et monte dans son hélicoptère direction Milanello, le centre d’entraînement du club lombard. Quelques minutes plus tard, le nouveau propriétaire de l’AC Milan entre dans le réfectoire où les joueurs sont en train de déjeuner. Applaudissements, tapes dans le dos. Berlusconi offre une coupe en argent à chaque membre de l’effectif, puis sort faire des sourires devant les photographes. Même s’il n’est pas encore officiellement président du club, il en profite pour signifier à la presse qu’il a déjà fait signer un joueur, le défenseur de la Roma Dario Bonetti. « Il m’est apparu comme un homme très mature. En effet, je ne veux pas seulement des joueurs doués techniquement. Je cherche des footballeurs dotés de qualités humaines », explique-t-il. Quelques mois plus tard, le 18 juillet, un Berlusconi cette fois intronisé présente son équipe au complet devant 6000 personnes au stade de l’Arena, en plein centre-ville : les joueurs descendent de trois hélicoptères sur fond de Wagner, au son de La Chevauchée des Walkyries. « Ce jour-là, je me suis dit : “Mais qu’est-ce que c’est que ce fou ?” », indique Alessandro Costacurta, alors tout jeune défenseur.…