USA: Steve Bannon, l’éminence grise de Trump, condamné à quatre mois de prison
Figure de l’extrême droite, l’ancien proche conseiller du milliardaire républicain a été condamné pour avoir refusé de coopérer avec l’enquête parlementaire sur l’assaut du Capitole. La peine sera suspendue s’il fait appel.
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C’est la figure la plus emblématique condamnée, à ce jour, dans le cadre des nombreuses investigations sur l’assaut du Capitole. Ancien directeur de campagne de Donald Trump en 2016 puis «conseiller en chef chargé de la stratégie» au début de sa présidence, Steve Bannon a écopé vendredi de quatre mois de prison ferme et 6500 dollars d’amende. Non pas pour avoir planifié ou participé aux événements du 6 janvier 2021, mais pour entrave aux prérogatives d’enquête du Congrès, selon liberation.
Figure du populisme d’extrême droite aux Etats-Unis, Bannon, 68 ans, avait été reconnu coupable fin juillet, par un jury populaire, des deux chefs d’inculpation d’outrage retenus contre lui. Le premier pour avoir refusé de témoigner devant la commission spéciale de la Chambre des représentants, qui enquête sur l’assaut du Capitole mené par les partisans de l’ancien président républicain. Le second, pour avoir refusé de transmettre au Congrès des documents, invoquant le droit des présidents à garder certaines conversations secrètes. Au cours du procès, l’accusé n’avait produit aucun témoin et n’avait pas pris la parole.
Lundi, les procureurs en charge du dossier avaient requis six mois de prison ferme contre Steve Bannon, dont ils ont épinglé «la défiance, la mauvaise fois et le mépris» tout au long de la procédure. Pour avoir conservé cette attitude jusqu’au bout, «il devrait être condamné à six mois de prison – le maximum du barème des peines – et à une amende de 200 000 dollars», estimaient les procureurs dans leur mémo adressé un juge fédéral chargé, ce vendredi, de prononcer la peine. Dans l’espoir de lui éviter un passage en prison, ses avocats avaient, de leur côté, demander au magistrat de retenir une peine de liberté conditionnelle ou d’assignation à domicile. La peine de prison ferme prononcée ce vendredi restera en suspens s’il fait appel, a indiqué le juge Carl Nichols à l’issue d’une audience dans un tribunal fédéral de Washington.
Figure de « l’alt-right »
Féroce contempteur de l’establishment, le natif de Virginie aux multiples vies, officier de la Navy, diplômé de Harvard, banquier d’affaires, producteur de films hollywoodiens mais aussi directeur du site d’information de droite radicale Breitbart, est considéré comme l’un des artisans de la victoire de Donald Trump en 2016. Prenant la place de Paul Manafort en août 2016, Bannon avait dirigé la campagne du magnat de l’immobilier dans les derniers mois précédant le scrutin.
Devenu ensuite l’un des puissants conseillers du président, rejoignant même pendant quelques mois le Conseil de sécurité nationale, Bannon, figure de «l’alt-right» nationaliste, avait été écarté de la Maison Blanche en août 2017, victime des guerres intestines au sein de l’administration Trump. Plus que ses positions radicalement à droite, notamment sur la question raciale, l’ancien banquier de Goldman Sachs, dépourvu d’alliés dans l’entourage présidentiel, avait alors payé sa propension à faire fuiter des informations aux journalistes, péché capital aux yeux de Trump.
Pour autant, le propagandiste était ensuite resté proche du milliardaire républicain et avait encore échangé avec lui le 5 janvier 2021, à la veille de l’attaque contre le siège du Congrès, réuni pour entériner la victoire de Joe Biden à la présidentielle de novembre 2020, contestée – sans la moindre preuve - par le président et ses partisans. Pour connaître la nature des discussions entre Trump et son ancien stratège en chef, la commission d’enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur le rôle du président – qu’elle a cité à comparaître la semaine dernière – dans ce coup de force avait assigné Steve Bannon à témoigner et à produire des documents.
Poursuivi pour fraude
Son refus lui avait valu d’être inculpé pour entrave aux prérogatives d’enquête du Congrès. Le 15 novembre 2021, dans une entrée médiatique calculée au cours de laquelle il avait appelé à «faire tomber le régime Biden», Steve Bannon s’était rendu aux agents du FBI avant de comparaître devant un juge fédéral. «Je veux que vous restiez concentrés sur le message, pas sur le bruit. Tout ça, c’est du bruit», avait-il lancé à son arrivée.
Steve Bannon n’est d’ailleurs pas au bout de ses déboires judiciaires. Début septembre, il a été inculpé à New York de fraude financière dans une affaire de détournement présumé de fonds destinés à la construction d’un mur entre les Etats-Unis et le Mexique, promesse de campagne emblématique de Donald Trump. La justice new-yorkaise l’accuse notamment d’avoir participé au blanchiment d’environ 15 millions de dollars levés aux Etats-Unis par l’association «We Build the Wall» pour financer l’érection du mur. Une «fraude» à l’encontre de «milliers de donateurs dans tout le pays», bernés par de «fausses promesses», indiquaient le mois dernier les procureurs new-yorkais.
Déjà mis en cause dans ce dossier par la justice fédérale, et même arrêté en août 2020, Steve Bannon n’a jamais été jugé car il été gracié par Donald Trump le 19 janvier 2021, la veille de l’investiture de Joe Biden. Dans cette affaire, l’ancienne éminence grise du magnat de l’immobilier, qui se dit «persécuté» par la justice new-yorkaise, a plaidé non coupable.