Les nouvelles séries de tirs nord-coréens exacerbent les tensions en Asie de l’Est
Séoul enchaîne les tirs de missiles. Sud-Coréens et Américains y répondent par un durcissement de leurs positions. Difficile de dire jusqu’où vont monter les tensions dans la péninsule, où plane aussi la menace d’un septième essai nucléaire de Pyongyang.
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L’enchaînement des tirs de missiles par le régime de Pyongyang alimente une escalade à l’issue incertaine dans la péninsule coréenne. Américains et Sud-Coréens ont annoncé jeudi 3 novembre une prolongation des exercices "Tempête vigilante" mobilisant depuis le 31 octobre 240 avions et des milliers de soldats. Il s’agit pour eux de "renforcer le dispositif de défense combiné contre toutes les menaces et provocations nord-coréennes".
La décision suivait de quelques heures trois nouveaux tirs de missiles par la Corée du Nord. Outre deux engins à courte portée, Pyongyang a lancé, pour la première fois depuis le mois de mai, un missile balistique intercontinental (ICBM) Hwasong-17. Parti de Sunan, non loin de la capitale, l’engin a parcouru 760 kilomètres avant de s’abîmer en mer du Japon. Ce tir a incité Tokyo à déclencher son système J-Alert d’alerte au missile appelant la population à s’abriter, par crainte qu’il ne passe au-dessus de l’archipel, ce qu’il n’a pas fait. Le lancement aurait été un échec, estime même l’armée sud-coréenne, selon lecho.
Il témoigne néanmoins de l’intensification des activités nord-coréennes depuis la fin août. Elles ont culminé le 4 octobre avec le tir d’un modèle de portée intermédiaire (IRBM) qui a survolé le Japon, une première depuis 2017. Elles ont franchi un nouveau palier le 2 novembre avec une salve de vingt-trois missiles à courte portée, un record. L’un de ces missiles est tombé à 57 kilomètres de la ville sud-coréenne de Sokcho (Côte est) à proximité de la "ligne de limite du Nord" (LLN), qui constitue la frontière maritime de facto entre les deux pays mais dont le tracé reste contesté. Le président conservateur sud-coréen, Yoon Seok-youl, a dénoncé une "invasion territoriale de fait". En guise de représailles, des avions de chasse sud-coréens ont tiré trois missiles air-sol.
Essai nucléaire
La question est désormais de savoir jusqu’où peuvent monter les tensions. La Corée du Nord affirme répondre aux manœuvres massives effectuées par les Américains, les Coréens du Sud, voire les Japonais, qu’elle considère comme une répétition de l’invasion de son territoire. Il y a eu fin août les exercices "Ulchi Freedom Shield", puis, en octobre, les manœuvres "Hoguk", et désormais "Tempête vigilante".
À cause de ces exercices, écrivait le 31 octobre le ministère nord-coréen des Affaires étrangères dans une tribune publiée par l’agence officielle KCNA, "la péninsule coréenne reste une zone de tensions les plus élevées au monde. Les conditions de sécurité régionale s’assombrissent".
La péninsule vit aussi dans l’attente d’un septième essai nucléaire nord-coréen. Les services secrets du Sud estiment qu’il pourrait intervenir avant le 8 novembre, jour des élections de mi-mandat aux Etats-Unis. L’inquiétude est d’autant plus grande que la Corée du Sud manque d’une stratégie d’engagement du Nord. Dans le même temps, la Corée du Nord s’est rapprochée de la Russie, dont elle appuie l’invasion de l’Ukraine et qui lui aurait demandé ses stocks de munitions datant de la période soviétique. Pyongyang ménage aussi son traditionnel partenaire chinois. Dans une lettre du 23 octobre, Kim Jong-un a félicité le président chinois, Xi Jinping, pour le succès du Congrès du Parti communiste et sa réélection. Il a aussi plaidé pour qu’"ensemble", les deux leaders "façonnent un plus bel avenir" pour les relations bilatérales. Dans ce contexte, il semble exclu de voir Moscou et Pékin voter au Conseil de sécurité de l’ONU des sanctions contre Pyongyang, comme ils l’avaient fait en 2017 après son 6e essai nucléaire.