Tunisie: les contrebandiers au parlement, une des principales raisons qui ont poussé le président à prendre ses décisions du 25 juillet
En Tunisie, les contrebandiers ont le bras long. Ils sont carrément au parlement et c’est une des principales raisons qui ont poussé le président tunisien Kaïs Saïed à prendre ses décisions du 25 juillet 2021.
Il l’a dit clairement, il veut en finir avec la corruption endémique qui caractérise le parlement et les partis politiques tunisiens, mais aussi la justice tunisienne complice indéniable de ces députés qui échappent à la loi prétextant leur immunité parlementaire.
Les vases communicants entre parlementaires et magistrats sont connus de tous et on a vu clairement le clivage dans les deux affaires des magistrats, au rang élevé, Taïeb Rached et Béchir Akremi. On a l’association des magistrats qui dénonce ce qui arrive à Béchir Akremi, mais se tait quand il s’agit de Taïeb Rached. Idem du côté des partis islamistes qui défendent, bec et ongles, M. Akremi.
Cette affaire, qui ne veut pas s’étouffer grâce à la mobilisation des médias, des magistrats soucieux de leur éthique et du comité de défense des martyrs Belaïd et Brahmi, relève la piètre image de la magistrature auprès de l’opinion publique tunisienne. C’est que les deux juges ont des rangs très élevés dans leur corporation.
Selon Business news, Béchir Akremi est ancien procureur de la République et il est accusé d’abus de pouvoir et d’ingérence dans des affaires juridiques, notamment, celles en rapport avec les assassinats politiques. A lui seul, il aurait étouffé plus de six mille dossiers impliquant des terroristes présumés.
Quant à Taïeb Rached, il est Premier président de la cour de cassation, président de l'Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de lois et membre du Conseil supérieur de la Magistrature. Il est accusé de blanchiment d’argent et de falsification. Il a avoué lui-même, sur un plateau TV, qu’il faisait son petit business en vendant et en achetant des biens immobiliers.
Quand on voit que l’un des magistrats les plus gradés du pays est réduit à être un simple promoteur immobilier, on ne devrait pas s’étonner que ses subordonnés aient leur petit business aussi.
C’est ce que les Tunisiens ont appris, avec stupéfaction, mardi . Après une investigation minutieuse, une brigade douanière a réussi à attraper une juge impliquée dans un trafic de devises. Dans sa voiture, une Golf 7, on a trouvé plus de quatre cent mille euros !
Quand on sait que dans les mafias et chez les trafiquants, la mule est le poste le plus bas de la chaîne, il y a de quoi s’interroger sur la « hiérarchie » de cette mafia qui emploie une juge pour être une simple mule !
La mafia qui emploie cette juge a donc le bras long, tellement long qu’elle peut se permettre de mettre une juge au bas de son organigramme.
Les juges d’instruction devraient dévoiler l’identité de ces personnes et de leurs complices dans l’appareil de l’Etat.
Sauf que voilà, le corporatisme a encore fonctionné et un juge a décidé, hier, de libérer sa consœur mule. Comme si rien ne s’était passé. Peu importe la réaction de l’opinion publique qui se remémore encore, il y a quelques semaines, comment un jeune promoteur tunisien a été emprisonné pour avoir acheté des bitcoins.
La corruption des juges est devenue, hélas, un secret de Polichinelle. Pas tous, naturellement, mais les quelques corrompus parmi eux sont en train de salir la réputation de toute la corporation. Ce corporatisme à lui seul peut être considéré comme de la corruption, car il n’y a rien qui justifie que l’on laisse partir tout de suite une personne ayant une telle somme d’argent à l’origine inconnue. Une somme en devises étrangères, de surcroit, dont la possession est légalement interdite, sauf justificatif.
Cette corruption endémique frappe donc le corps de la magistrature aussi bien en bas qu’en haut de l’échelle.