Volodymyr Zelynsky limoge son Général en Chef en pleine tempête
Le président Volodymyr Zelensky a fini par écarter le 15 février 2024 son général en chef dans le cadre d'une réorganisation en profondeur de son commandement militaire.
Il s’agit bel et bien du plus grand remaniement au sein de l’exécutif depuis « l’opération spéciale » russe il y a près de deux ans, révèle The New York Times, le 16 février 2024, dans l’article ; « Zelensky Removes His Top General, in Major Shake-Up of Ukraine Military ».
Qu’on y songe, le limogeage met fin à des semaines de spéculation sur le sort du commandant, le général Valery Zaluzhny, dont les relations avec M. Zelensky s'étaient bien détériorées alors que l'Ukraine n'avait pas réussi à faire une percée lors de sa contre-offensive l'été et l'automne 2023.
M. Zelensky était prêt à renvoyer le Général il y a 11 jours avant de temporiser temporairement, ont déclaré des responsables ukrainiens.
Or des rumeurs avaient commencé à circuler en ligne en Ukraine début février 2024 selon lesquelles le Général Zaluzhny avait été limogé, incitant le bureau du président à publier un démenti. Un membre du Parlement ukrainien avait déclaré que les deux hommes s'étaient rencontrés le 29 janvier 2024, mais le sort du commandant militaire en chef du pays n’était pas encore tranché.
De plus, des frictions entre le Président et le Général avaient couvé depuis le début de la guerre dans une rivalité principalement cachée au public . « Le schisme » est apparu à l'automne 2023, lorsque le Général Zaluzhny a publié un essai déclarant la guerre dans une impasse, contredisant les assertions continuelles et optimistes de Vodymyr. Zelensky sur les progrès militaires.
Cette rupture a suivi une contre-offensive ukrainienne soutenue par des milliards de dollars de dons d'armes occidentales qui n'a pas réussi à obtenir une percée, qui s’est soldée par des milliers de victimes ukrainiennes.
Le remaniement de grande ampleur survient à un moment fatidique pour l'Ukraine .
De fait, tandis que des attaques russes s’intensifient, des querelles partisanes aux États-Unis quant à la fourniture d'aide au gouvernement de Kiev et des tensions entre la direction civile et militaire de l'Ukraine s’amoncellent.
Tout en louant le Général Zaluzhny, qui dirige l'armée nationale depuis l'invasion à grande échelle de la Russie il y a deux ans, Volodymyr Zelensky a déclaré que des "changements urgents" étaient nécessaires pour assurer la victoire., et c’est ainsi que le Président Zemlinsky l’a finalement remplacé par le général Oleksandr Syrsky, chef des forces terrestres de l'Ukraine.
"À partir d'aujourd'hui, une nouvelle équipe de direction prendra la tête des forces armées ukrainiennes", a lancé Volodymyr Zelensky lors d'une allocution télévisée à l’adresse de la nation, ajoutant qu'il avait rencontré le Général Zaluzhny et lui avait remercié pour ses services rendus.
Quoiqu’il en soit, la décision de retirer la direction militaire du plus haut gradé au moment même où l’ennemie lance une offensive comporte bien des risques. Il en va notamment de la perturbation de la planification opérationnelle. Par ailleurs l'Ukraine ne dispose pas d'un large éventail de hauts commandants pour les postes d'état-major général.
Volodymyr Zelensky a-t-il nommé dans la foulée cinq généraux et deux colonels qu'il compte promouvoir. Dans cette perspective, cette nouvelle équipe de commandement devait commencer par élaborer "un plan d'action détaillé pour l'année à venir".
Cependant, tout plan d’action devra tenir compte de l'incertitude quant à la cadence et à la quantité des armements occidentaux, sans oublier les défis liés au recrutement de nouveaux soldats pour le combat.
Dans ce contexte, alors qu'un nouveau plan de mobilisation est en cours de débat au Parlement, Volodymyr Zelensky doit faire face à des critiques sévères.
C’est ainsi que certains parlementaires affirment qu'il ne s’est pas exprimé suffisamment sur le besoin impérieux de soldats supplémentaires et a qu’il évité peut être sciemment de prendre des décisions difficiles et peut-être impopulaires politiquement concernant ce fameux recrutement de soldats.
Pour sa part, le général Zaluzhny, âgé de 50 ans, a-t-il exhorté la nation à rester unie dans sa lutte pour sa survie. "Nous avons survécu ensemble", a-t-il déclaré.
Tout le monde doit continuer à s'adapter "aux nouvelles réalités" de la guerre.
Or chacun sait que pour son remplaçant, le général Syrsky, aura une tâche redoutable en assumant le commandement d'une armée qui a du mal à recruter des soldats et qui est de plus en plus dépassée par un adversaire bien armé.
Et il y a plus, il prendrait un poste laissé vacant par un général très populaire dans l'armée et la société civile.
Des responsables américains ont exprimé leur inquiétude quant à la profondeur des changements
Si des responsables de l'administration Biden ont déclaré que les États-Unis respecteraient la décision du président Zelensky de changer le commandant en chef de l'Ukraine en temps de guerre, en privé, des responsables américains ont exprimé leur inquiétude quant à la profondeur des changements. Un changement total en haut de la hiérarchie, pourrait avoir un effet néfaste sur le champ de bataille.
Les figures de l'opposition à Kiev ont déclaré que le désir de Volodymy Zelensky de renvoyer le Général Zaluzhny était motivé par des facteurs politiques.
Les sondages d'opinion avaient pourtant régulièrement classé le président et le général comme les figures les plus dignes de confiance en Ukraine pendant la guerre.
À l'automne 2023, les cotes de Volodymy. Zelensky avaient baissé, tandis que le général Zaluzhny avait conservé des niveaux de soutien constamment élevés.
La haute estime du Général Zaluzhny auprès du public ukrainien a suscité bien des spéculations selon lesquelles il pourrait être un challenger potentiel pour Volodymy Zelensky lors des élections futures, incitant certains dans le pays à les considérer comme des rivaux politiques.
Volodymy Zelensky a cherché du reste à détourner cette critique , présentant sa décision comme faisant partie d'une refonte d'un système nécessitant une réflexion et non un différend personnel.
Le renvoi de M. Zaluzhny, ne marque pas, pour autant une rupture bien franche compte tenu de la contre-offensive ratée. Le commandant choisi par Volodymy Zelensky pour le remplacer, le général Syrsky, avait dirigé l'un des éléments de cette offensive qui avait suscité de vives critiques de la part des responsables américains : une tentative de reprendre la ville orientale de Bakhmut au cours de l’été 2023. Les États-Unis avaient exhorté l'Ukraine à concentrer toutes ses forces sur une seule poussée pour briser les lignes russes au sud.
Les forces ukrainiennes ont ces dernières semaines été sur la défensive alors que la Russie lance de violentes attaques le long de la ligne de front.
Kiev a reçu un coup de pouce à son effort de guerre début février 2024 lorsque l'Union européenne a approuvé un paquet d'aide de 54 milliards de dollars qui aidera à éviter une crise financière à court terme en Ukraine.
Dans le même temps, les législateurs à Washington à la mi févier 2024 ont du mal à trouver un accord pour fournir 60 milliards de dollars supplémentaires d'aide à l'Ukraine.
Or cette assistance est assurément cruciale, mais quoiqu’il en soit bien insuffisante pour l'effort de guerre en Ukraine…
On l’aura compris, le limogeage du Général Zaluzhny par le Général Syrsky survient à un moment plus que critique quant au sort de la Guerre en Ukraine… mais le changement d’homme à la tête de l’armée y compris de l’ensemble des hauts gradés, changera-t-il l’issue de cette « opération spéciale » … Rien n’est moins sûre.