Accord de 1968 : bras de fer migratoire entre l’Algérie et la France
L'accord franco-algérien de 1968, régissant la circulation, l'emploi et le séjour des ressortissants algériens en France, est au cœur de débats politiques récurrents.
Signé le 27 décembre 1968, cet accord visait initialement à faciliter l'entrée de la main-d'œuvre algérienne en France, accordant aux Algériens des conditions spécifiques par rapport aux autres ressortissants étrangers.
Historique et dispositions principales de l'accord
À la suite des accords d'Évian en 1962, les Algériens bénéficiaient d'une libre circulation en France. Cependant, face à l'augmentation des flux migratoires, la France et l'Algérie ont signé en 1968 un accord établissant des quotas annuels d'entrée pour les travailleurs algériens, initialement fixés à 35 000 par an. Les travailleurs disposaient d'un délai de neuf mois pour trouver un emploi, après quoi ils pouvaient obtenir un certificat de résidence valable cinq ans, extensible à leur famille. Les touristes algériens pouvaient, quant à eux, séjourner en France jusqu'à trois mois sans formalités particulières.
Évolutions et révisions de l'accord
Depuis sa signature, l'accord a été modifié à plusieurs reprises, notamment en 1985, 1994 et 2001, afin d'adapter ses dispositions aux contextes migratoires et politiques changeants. Bien que certaines clauses initiales aient été durcies, les ressortissants algériens conservent des avantages spécifiques, tels qu'une procédure simplifiée pour l'obtention de titres de séjour et des facilités pour l'exercice d'activités professionnelles en France.
Débats politiques et tensions récentes
L'accord de 1968 est régulièrement critiqué par certains responsables politiques français, qui estiment qu'il accorde des privilèges excessifs aux Algériens et appellent à sa révision ou à son abrogation. En octobre 2024, le ministre de l'Intérieur français, Bruno Retailleau, a exprimé son souhait de renégocier l'accord, évoquant une dégradation des relations bilatérales. Cette position a été renforcée en janvier 2025 par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, qui a exhorté à dénoncer l'accord pour "poser les limites et assumer le rapport de force avec l'Algérie". Ces déclarations interviennent dans un contexte de tensions diplomatiques accrues entre les deux pays, notamment liées à des questions mémorielles et migratoires.
Réactions algériennes
Du côté algérien, ces appels à la révision de l'accord sont perçus comme des manœuvres politiques. Le président Abdelmadjid Tebboune a qualifié l'accord de "coquille vide" en octobre 2024, rappelant que ses dispositions avaient déjà été restreintes par rapport aux accords d'Évian de 1962. Il a également critiqué l'utilisation de cet accord comme "slogan politique" en France, destiné à satisfaire certaines franges de l'électorat.
Perspectives d'avenir
Selon un sondage réalisé en 2025, 74 % des Français seraient favorables à l'abrogation de l'accord de 1968. Cependant, toute modification ou dénonciation de cet accord nécessiterait des négociations diplomatiques complexes, compte tenu des liens historiques et humains profonds entre les deux nations. La question demeure sensible, reflétant les défis persistants dans les relations franco-algériennes.