Burkina Faso : une guerre d'influence entre la France et la Russie
A l'instar des coups d’État de 2020 et 2021 au Mali, le putsch militaire au Burkina Faso est marqué par des manifestations anti-françaises où l’on brandit le drapeau russe.
À la suite du coup d’État militaire du capitaine Ibrahim Traoré, ce vendredi 30 septembre au Burkina Faso, les manifestants soutenant les putschistes s’en sont pris violemment à l’ambassade de France et à l’institut français.
Et comme à Bamako en 2020, des drapeaux russes ont surgi dans la foule, réclamant un appel du nouveau pouvoir au groupe Wagner, déjà bras armé du Kremlin en Centrafrique et au Mali.
Certes, entre 1960 et 1991, sous Modibo Keita et Moussa Traoré, le Mali était dans la sphère d’influence de l’URSS et donc, déjà, du Kremlin… Mais le face-à-face Paris-Moscou au Sahel n’est pas un "retour de la guerre froide", souligne aujourd’hui Niagalé Bagayoko, spécialiste des conflits et de la sécurité en Afrique subsaharienne, présidente de l’African Security Sector Network.
"Il ne faut pas plaquer des schémas historiques sur la dynamique actuelle. Penser que les acteurs locaux sont uniquement manipulés soit par la France, soit par la Russie est une erreur, commence la chercheuse.
Les gouvernements malien et burkinabé tombent d’abord parce qu’ils sont impuissants à garantir la sécurité des citoyens."
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"Protéger le pays des attaques des groupes terroristes"
"La colère des Burkinabé a les mêmes racines que lors du précédent coup d’État à Ouagadougou, il y a huit mois : c’est d’abord l’incapacité de l’appareil militaire et des différents acteurs engagés, parmi lesquels les Français, à protéger le pays des attaques de groupes terroristes", rappelle-t-elle.
Pourquoi avec un tel succès ? "Il ne faut pas oublier que durant la Guerre froide, l’URSS a soutenu les luttes anti-coloniales et la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud", passé dont Moscou sait se servir aujourd’hui pour brouiller les cartes et avancer ses pions.
"Le pouvoir russe sait profiter d’un contexte de grande désaffection à l’égard de la France et de l’Occident tournant aujourd’hui à l’hostilité, les opinions publiques reprochant aux Occidentaux leur double discours sur les Droits de l’homme et la démocratie quand ils soutiennent des dictatures", rappelle également Niagalé Bagayoko.
Pour quel "but de guerre" ? "La conquête des marchés pour les acteurs privés russes mais, surtout, la conquête croissante, au niveau stratégique, d’une plus grande influence en Afrique pour la diplomatie russe, a fortiori dans un contexte de risque d’isolement lié à la guerre en Ukraine", selon LaDepeche.