Conflit en Mer Rouge : Israël et les Houthis bloquent le passage des pétroliers au Yémen
Dans les eaux agitées de la mer Rouge, près du port de Ras Isa au Yémen, une flottille inhabituelle de pétroliers attend son tour pour accoster, suite à des frappes israéliennes qui ont gravement endommagé les remorqueurs nécessaires.
L'incident, qui se produit dans un contexte géopolitique tendu, met en lumière les fragilités croissantes des routes maritimes et l'impact des attaques militaires sur le commerce international, rapporte l’Agence Bloomberg ( Oil Tankers Back up After Israël hits tugs, 10 janvier 2025).
Des attaques qui paralysent le Port
Depuis la fin décembre 2024, plusieurs remorqueurs ont été lourdement endommagés lors de frappes menées par l'armée israélienne.
Ces attaques ont empêché les remorqueurs de faire leur travail essentiel : amener les pétroliers à quai pour leur déchargement. Résultat, une congestion sans précédent se forme dans les eaux autour du port de Ras Isa, où au moins 15 pétroliers, certains transportant du carburant russe, sont désormais coincés.
Les autorités portuaires yéménites, prises au piège d'une situation inédite, tentent tant bien que mal de désengorger le port.
Un docker du terminal et un responsable du ministère des Transports, qui ont demandé à rester anonymes, confirment que le processus d’entrée des navires dans le port est extrêmement lent, créant ainsi un embouteillage maritime qui alourdit les coûts et prolonge les délais pour les opérateurs.
Selon des données de suivi des navires recueillies par Bloomberg et Vortexa, ces pétroliers ont provoqué un goulot d'étranglement logistique majeur, sur fond d’un marché déjà fragilisé par des tensions régionales.
Un contexte géopolitique incandescent
Cette situation n’est pas une anomalie isolée, mais fait partie d’un schéma plus large de perturbations maritimes dans la région.
Les frappes israéliennes sur le Yémen s'inscrivent dans un contexte plus vaste de guerre par procuration entre Israël et ses ennemis, notamment l’Iran et les Houthis, ces derniers étant responsables de nombreuses attaques contre les navires marchands dans la mer Rouge.
Le commerce mondial, particulièrement dans le secteur de l'énergie, dépend largement de cette route stratégique, mais les tensions militaires ont sérieusement entravé les opérations commerciales dans cette zone cruciale.
Les Houthis, qui contrôlent une partie du Yémen, ont multiplié les assauts contre des navires commerciaux dans la région.
En parallèle, les frappes israéliennes ciblent les installations militaires et les infrastructures portuaires yéménites, exacerbant les retards et augmentant les risques pour les opérateurs maritimes.
Les autorités maritimes ont d’ailleurs conseillé aux navires marchands de ne pas entrer dans les eaux territoriales yéménites, après des frappes aériennes de vendredi dernier dans des zones sous contrôle houthi, y compris autour de Ras Isa. Selon la société de sécurité maritime Ambrey, bien qu’aucune attaque n’ait été signalée contre des navires marchands, la menace demeure omniprésente.
Les câbles sous-marins, un enjeu invisible
Au-delà des attaques directes contre les navires, un autre enjeu stratégique majeur se cache dans cette région : la sécurité des câbles sous-marins.
Ces infrastructures vitales assurent la connectivité numérique mondiale en reliant l'Europe, l'Asie et l'Afrique. L'acheminement des données transcontinentales passe par des câbles situés dans la mer Rouge, et toute perturbation dans cette zone pourrait avoir des répercussions bien au-delà des frontières du Yémen.
Les tensions croissantes sur les voies maritimes yéménites mettent en évidence la vulnérabilité de ces infrastructures cruciales. Si des attaques indirectes frappent ces câbles, elles pourraient perturber non seulement les marchés commerciaux, mais aussi les communications mondiales.
La protection de ces câbles devient ainsi un enjeu stratégique majeur pour les puissances mondiales ayant des intérêts dans cette région.
Les répercussions de ces attaques israéliennes et houthies dépassent les simples frontières du Yémen. Les retards et l’augmentation des coûts des trajets maritimes sont désormais une réalité pour les armateurs, les gouvernements et les entreprises opérant dans cette zone. Le commerce mondial, qui dépend fortement de la fluidité des routes maritimes, subit des contrecoups économiques non négligeables.
Le marché maritime, déjà éprouvé par la pandémie et les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales, se trouve à présent confronté à une instabilité géopolitique qui ne cesse d'empirer.
Les tensions dans la mer Rouge, exacerbées par les frappes militaires, forcent les entreprises à repenser leurs itinéraires et leurs stratégies logistiques.
Dans ce contexte, sécuriser ces routes commerciales devient une priorité stratégique pour de nombreuses nations. Bloomberg conclut en soulignant que la situation au Yémen illustre non seulement les défis immédiats auxquels le secteur maritime est confronté, mais aussi la fragilité de l’ensemble du système commercial mondial, de plus en plus vulnérable aux enjeux géopolitiques et aux attaques militaires.
Olivier d’Auzon