Didier Raoult, est-il vraiment un faussaire ? Explications
Le magazine d’investigation de France 2 s’est intéressé au médiatique et controversé professeur marseillais, confirmant tous les doutes qui émergent depuis des mois sur ses méthodes.
Didier Raoult, médecin star de la période Covid, qui disait pouvoir guérir le monde grâce à l’hydroxychloroquine, n’est plus le directeur de l’Institut hospitalo-universitaire de Marseille depuis juillet.
Un IHU qu’il a fondé où travaillent 700 personnes, désormais étroitement géré et surveillé par les services de l’état, et dans le collimateur de la justice. Car les griefs contre le chercheur préféré des complotistes sont nombreux et remonteraient bien avant l’épidémie de coronavirus.
Notamment concernant le fonctionnement de la structure. Un fonctionnement auquel s’est intéressé le magazine d’investigation de France 2 « Complément d’enquête », diffusé ce jeudi 17 novembre au soir sur France 2 et dont la dernière émission était intitulée « Didier Raoult. le savant fou «.
Des études faussées
En partant d’un fichier de patients ayant participé à l’étude de l’IHU de Marseille et en le recoupant avec celui de l’étude de Didier Raoult, le journaliste Tristan Waleckx et ses équipes ont pu constater que les données d’au moins quatre patients sur 16 avaient été mal reportées dans l’étude finale.
Selon André Gillibert, biostatisticien au CHU de Rouen interrogé dans l’émission, « quatre erreurs sur un échantillon aussi petit, ça fait un taux d’erreur qui est inacceptable. Et si en plus, ces erreurs vont toujours dans le même sens… »
Le problème est qu’au sein de l’IHU, les doutes et remises en question de la méthode Raoult étaient impossibles. Les résultats faux, « on s’en fiche. Ce qui compte, c’est qu’on parle de moi », rapportait un chercheur ayant travaillé sous ses ordres, indique Sudouest.
Un système qui a perduré grâce à des protections, avance le magazine. La première dont a bénéficié le professeur, celle des réseaux sociaux, avec une foule d’antivax qui en ont fait leur idole, qui l’ont défendu contre vents et marées mais surtout ont harcelé tous ses contradicteurs, comme Yves Lévy, ex-directeur de l’Inserm et mari d’Agnès Buzyn, l’ex ministre de la santé. Un groupe de harcèlement nommé “CIA” qui agissait même sur ordre direct de Didier Raoult.
Des protections plus anciennes aussi, lui auraient permis d’échapper à des sanctions disciplinaires malgré de nombreuses remontées de couverture d’agressions sexuelles au sein de ses services, ou encore d’un management particulièrement brutal. Une procédure, lancée en 2018, n’aboutira jamais.
Des protections multiples
Dès 2017, des ingénieurs de l’IHU dénonçaient le professeur Raoult dans une lettre anonyme envoyée aux autorités de tutelle. Ils se disaient « rabaissés, humiliés », voire menacés de « mort professionnelle ».
Selon un syndicaliste qui a témoigné dans « Complément d’enquête », aucun d’entre-eux ne serait encore en poste aujourd’hui, car ils auraient payé pour avoir « osé trahir Didier Raoult et son équipe dirigeante ».
Un professeur marseillais qui n’est pas venu défendre son étude au cours de l’émission : selon la production, « à partir du moment où Didier Raoult a su que Complément d’Enquête avait récupéré un fichier interne prouvant que les données de son étude sur l’hydroxychloroquine avaient été faussées en mars 2020, toutes nos demandes d’interview ont fait ‘pschitt, pschitt, pschitt’».