France : la promulgation « forcée » de la réforme des retraites suscite encore de la colère
La loi très controversée sur la réforme des retraites votée le 17 mars dernier, par recours à la motion de censure ne passe toujours pas auprès d’un nombre important de citoyens.
Dans cet entretien accordé à Al Ain, Santiago Follet, membre du parti de l’extrême gauche NPA ( Nouveau Parti Anti- Capitaliste/ Socialisme ou barbarie), explique comment cette loi imposée d’une manière « antidémocratique », continue de susciter de la colère.
Il ya en France comme l’impression que le passage de la loi sur la réforme des retraites est restée en travers de la gorge. Votre parti, le NPA, s’est farouchement opposé à cette réforme et ne s’est pas démobilisé depuis le début de la contestation. Ya-t-il le sentiment que les luttes sociales n’ont plus beaucoup de résonance auprès des décideurs ?
Permettez-moi tout d’abord de rappeler que la loi sur les retraites était voté suite à une longue bataille menée par les gouvernements français successifs.
Ils ont essayé depuis quelques décennies de s'attaquer au système des retraites, ce qui a provoqué plusieurs mouvements sociaux comme celui du 1995, qui a mis la France à l'arrêt pendant plusieurs semaines.
L'âge du départ légal à la retraite était auparavant à 60 ans avait été déjà décalé à 62 depuis quelques années.
En 2023, après un essaie frustré de passer d'un système de répartition à un système à points (initié en 2020), Le Président français Emmanuel Macron a voulu avancer une nouvelle réforme pour reculer encore l'âge légal du départ à la retraite à 64 ans.
Cela n'a pas pu convaincre, la raison pour laquelle le gouvernement a du recourir à l’usage d’un mécanisme antidémocratique, incarné par le dispositif 49.3 ( mesure exceptionnelle consistant à faire adopter un texte sans vote par l’Assemblée nationale), pour imposer une reforme totalement antipopulaire.
Quatorze journées de grève ont eu lieu entre janvier et juin de 2023, auxquelles avait appelé l'intersyndicale, un regroupement des principales centrales syndicales du pays. Des syndicats dits réformistes ont organisé un plan de bataille saute-mouton, avec des journées de grève décalées dans le temps avec des pauses de 10 jours sans actions.
Les mobilisations contre la réforme des retraites étaient énormes sur plusieurs mois, avec les pics d’un million de personnes enregistrés en janvier puis en mars dernier. Pourrions-nous conclure qu’il ya eu une réunification des luttes sociales ?
Cette orientation de la lutte a en effet, était forte et unifié, mais n'a pas vraiment réussi à organiser la victoire du mouvement, au contraire, les tactiques parlementaires et des dialogues sociaux ont donné un souffle d'air au gouvernement Macron pour sortir d'une crise politique qui aurait pu lui couter sa démission.
Dans ce sens, il est à souligner la détermination des grévistes organisés à la base. Ils ont pu organiser la reconduction de la grève, au delà du calendrier de l'intersyndicale, comme les éboueurs parisiens, ou les raffineurs, entre autres.
Les jeunes et les étudiants avaient brillé par leur présence, au premier front même, et sur de longues semaines. Vous êtes le représentant de votre parti dans une université qui est connu pour être un haut lieu de la mobilisation sociale, en l’occurrence Paris 8. Pourriez-vous nous décrire en quelques mots cette mobilisation estudiantine ?
Chez les étudiants, une coordination nationale étudiante et une coordination inter-facs ont été organisées par l'initiative du NPA Jeunes, entre autres.
Cette coordination a joué un rôle pour mobiliser les jeunes contre la reforme et pour organiser plusieurs actions de mobilisation, comme la manifestation parisienne le jour ou le gouvernement a déclenché le 43.9 a l'Assemblée Nationale. Le NPA a également participé à la construction des Assemblées Générales interpros et des regroupements des grévistes à la base.
Où en est le militantisme du NPA après cette « perte » de la bataille des retraites ?
Bien que la reforme est déjà passé, la colère continue chez les travailleurs, pour l’amélioration des conditions de travail, les salaires, l'inflation et toutes les problématiques liées au monde du travail.
Et la lutte pour les droits se poursuit également à travers des nouveaux mouvements sociaux qui ne sont pas à écarter.
Nous avons eu, à coté des mobilisations pour la classe ouvrière et les droits des travailleurs, la grande contestation contre les violences policières déclenchée après l’assassinat de l’adolescent Nahel 17 ans, en juin dernier, par un policier pour un défaut de permis, et se poursuivent maintenant avec notre mobilisation pour la Palestine.