France/reconfinement partiel : les commerces fermés crient à l’injustice
La liste des commerces autorisés à ouvrir n’en finit pas de susciter l’incompréhension des commerçants.
Boutiques de vêtements pour enfants ou d’articles de sport ne comprennent pas les raisons de leur fermeture.
En novembre, le gouvernement français avait scindé le commerce en deux, entre ceux qu’il jugeait «essentiels» et ceux qui ne l’étaient pas. Pour ce troisième confinement partiel, le terme «essentiel» n’a pas été repris, pour ne pas froisser le secteur. Les commerçants n’en restent pas moins partagés entre ceux qui ont le droit d’ouvrir et ceux qui doivent baisser le rideau.
Aux magasins de bricolage, de puériculture ou aux jardineries, déjà autorisés à rester ouverts en novembre, ont été ajoutées une multitude d’exceptions : les chocolatiers, pour qui Pâques est la saison la plus importante, les fleuristes, qui vendent beaucoup de plantes au printemps, les libraires, les disquaires, les coiffeurs, les cordonniers ou encore les concessionnaires automobiles, «parce que derrière, il y a des dizaines de milliers d’ouvriers qui sont concernés», a expliqué Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie.
Difficile à comprendre
Réduite à peau de chagrin, la liste des commerces contraints de fermer n’en est que plus difficile à comprendre. «On peut aller s’acheter une voiture alors qu’on est en confinement, mais on ne peut pas racheter des vêtements pour un enfant qui grandit, s’insurge Yohann Petiot, le délégué général de l’Alliance du commerce. Cette liste à la Prévert n’a rien de cohérent. Elle ne fait que stigmatiser les commerces fermés.»
L’équitation est autorisée, mais vous ne pouvez acheter ni bottes, ni bombe ; le foot est autorisé, mais vous ne trouverez pas un magasin de sport où acheter un ballon.
Certains, qui jugent la liste injuste, montent au créneau. Les magasins de sport, par exemple, ne comprennent pas que le gouvernement d’un côté appelle les Français à s’aérer en extérieur, et de l’autre ferme les points de vente où ils pourraient s’équiper en articles de sport.
Et sur Amazon, vous ne pouvez pas faire réparer votre raquette», souligne Virgile Caillet, le délégué général de l’Union sport et cycle. Les magasins de gros électroménager soulignent que remplacer un frigo en panne a tout du caractère d’urgence. Quant aux distributeurs d’articles dédiés aux enfants, ils ne s’estiment pas moins essentiels que les coiffeurs ou les magasins de bricolage.
«Les enfants grandissent, les vêtements s’usent, constate Cédric Dardenne, PDG de Jacadi. Et puis les vacances arrivent. Il faudra occuper les enfants : pourquoi fermer les magasins de jouets?» Et si les libraires et les disquaires sont ouverts, pourquoi pas les magasins de jeux vidéo? avancent ces derniers. Ils étaient parmi les plus actifs dans leur demande de réouverture jusqu’à ce qu’à ce que leurs juristes découvrent… que le décret leur laisse la possibilité de rester ouverts, en tant que «commerce de détail de logiciels».
Ajuster «au cas par cas»
La liste pourra être ajustée «au cas par cas», avaient assuré ce week-end et lundi matin Bruno Le Maire et Alain Griset, le ministre du Commerce. Seules les esthéticiennes pourraient finalement être ajoutées in extremis à la liste des heureux élus, précise Bercy. «On ne va pas changer la liste en permanence.»
Pour faire passer cette pilule amère, les aides pourraient en revanche être musclées. À l’arsenal déjà existant, le gouvernement s’apprête à ajouter d’autres dispositifs. Deux pistes sont à l’étude pour aider les commerces à faire face à leurs invendus. «Il y a désormais trois collections qui s’empilent dans les boutiques, souligne Yohann Petiot, c’est catastrophique.» Dès avant le reconfinement, les commerçants espéraient obtenir la possibilité de vendre leur stock à perte une fois rouverts - cela n’est normalement permis qu’en période de soldes.
En complément, le gouvernement envisage de leur offrir une «compensation financière». «Mais la meilleure façon d’écouler notre stock, c’est encore de nous laisser ouvrir, avance Emmanuel Le Roch, de la fédération du commerce spécialisé. Notamment dans les zones où le virus est moins actif, mais où les commerces et centres commerciaux de plus de 20 000 m2 sont encore fermés.»