La France tire la sonnette d'alarme, sécheresse historique enregistrée
La France a connu cet été une sécheresse historique, comparable à celles de 1976 et 2003. La persistance de celle-ci en cet automne inquiète tous les acteurs de l’eau.
À l’heure où de nouvelles études prédisent un réchauffement plus intense que prévu, l’eau, sa préservation et son partage, devient un enjeu majeur.
Les températures douces de cet automne sont comme un prolongement de l’été. Mais elles prolongent aussi la sécheresse extrême historique qui a sévi en France en juillet et en août, à telle enseigne que la situation de l’eau en devient inquiétante.
Selon un bilan de l’été réalisé par Météo-France, on a assisté cette année à « une sécheresse des sols superficiels historique. » « L’indice d’humidité des sols superficiels a été déficitaire sur la totalité du pays durant cet été.
Les sols se sont nettement asséchés et sont souvent devenus très secs à extrêmement secs. Fin juillet, ils ont atteint des niveaux records secs historiques en région PACA, Corse, Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine et dans le Grand Est », rappelle Météo-France.
« Cette sécheresse, comparable à celles de 1976 et 2003, est devenue la plus sévère jamais enregistrée en France avec des valeurs d’humidité des sols superficiels battant des records de faible humidité du 17 juillet au 16 août puis de nouveau à partir du 28 août au niveau national malgré quelques épisodes orageux intenses mais localisés principalement de l’Auvergne au Languedoc et à la région PACA ainsi que sur la région parisienne mi-août. »
Et si en septembre, on a assisté à des précipitations abondantes, « supérieures aux normales de saison, atteignant 1,5 fois la normale sur Bourgogne-Franche-Comté ou encore 1,4 fois la normale sur le Grand Est.
En revanche, le Sud-Ouest ainsi que le pourtour méditerranéen restent moins impactés par ces précipitations. »
Plus de 50 % des cours d’eau en rupture d’écoulement
Face à cette situation, Alain Rousset, président de la Région Nouvelle-Aquitaine et président du Comité de bassin Adour-Garonne, a réuni le 11 octobre dernier les acteurs de l’eau aux côtés d’Etienne Guyot, préfet coordonnateur de bassin, lors d’une séance extraordinaire consacrée à un premier bilan de la sécheresse 2022 et aux perspectives à venir.
« L’année 2022 affiche le plus grand nombre de cours d’eau en assec en juillet-août, selon le réseau de mesures mis en place en Adour-Garonne. Des lâchers d’eau exceptionnellement précoces ont été opérés, puis pilotés au plus juste pendant toute la période d’étiage pour maintenir un niveau suffisant dans les cours d’eau, notamment sur la Garonne », indique le comité, qui souligne que « plusieurs centaines de communes ont été confrontées à des difficultés dans leur production d’eau potable, sur tous les secteurs du bassin Adour-Garonne.
Plusieurs dizaines de petites communes du bassin ont dû être alimentées par camions-citernes. »
« La réponse à la crise que nous traversons passera par la massification de la transition engagée par les territoires, et les collectivités ont un rôle majeur à y jouer. Nous devons accélérer la mise en œuvre des actions relatives à la sécurisation quantitative et qualitative de l’eau notamment vers l’agroécologie », estime Alain Rousset, qui a appelé à « accélérer les travaux de sécurisation en eau potable et engager massivement les mesures d’adaptation au changement climatique prévues dans les feuilles de route par sous-bassin portées par les Établissements publics territoriaux de bassin (EPTB). » Un retour d’expérience sera réalisé pour améliorer la gestion de crise, mais aussi pour alimenter la planification des investissements nécessaires.
Des récoltes fortement perturbées
Cette sécheresse 2022 a eu des conséquences dramatiques particulièrement chez les agriculteurs.
« Malgré un mois de septembre relativement pluvieux, la sécheresse des nappes et des sols est toujours d’actualité. Le bilan des récoltes des cultures d’été est en deçà des rendements habituels et les situations individuelles parfois très hétérogènes dans un même territoire », indiquaient le 3 octobre Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, et Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’Écologie lors du 4e comité de suivi de la situation de sécheresse dans le monde agricole.
« Les nouvelles prévisions de production de maïs par le service de la statistique et de la prospective au 1er septembre montrent une forte baisse de la production nationale à 11,3 millions de tonnes (Mt) de maïs grain (- 1 Mt) soit – 17,1 % par rapport à la moyenne 5 ans et – 25,4 % par rapport à 2021. C’est la plus faible récolte depuis 1990. » Idem pour la production cumulée des prairies permanentes « inférieure de 33 % par rapport à la période de référence (1989-2018). C’est la production la plus faible depuis 2003. »
« Les conséquences pour l’agriculture de cette sécheresse 2022 sont fortes et visibles. Elles pourraient être durables et peser sur le dépérissement de cultures pérennes ou la décapitalisation des cheptels au sortir de l’hiver prochain », estime Marc Fesneau. D’ores et déjà, 11 départements dont 4 en Occitanie vont bénéficier d’une indemnisation rapide au titre des calamités agricoles.
Un chantier de « France nation verte »
Enfin, ces déficits d’eau mettent à mal tout le système hydroélectrique qui représente 13 % de la production d’électricité dans le mix énergétique de la France…
Alors que de nouvelles projections climatiques publiées dans la revue Earth System Dynamics le 4 octobre, montrent que le réchauffement en France pourrait être jusqu’à 50 % plus intense au cours du siècle que ce que montraient les précédentes estimations, la gestion de l’eau, son partage, sa préservation apparaissent comme une priorité. L’eau est d’ailleurs l’un des 22 chantiers de « France nation verte », la feuille de route de la planification écologique présentée le 21 octobre par la Première ministre Elisabeth Borne, selon LaDepeche.