Maaten al-Sarra en Libye : un hub stratégique au cœur de l’expansion russe en Afrique
La décision de Khalifa Haftar d’autoriser les forces russes à prendre le contrôle de la base aérienne de Maaten al-Sarra marque une étape importante dans l’expansion stratégique de la Russie en Afrique.
Située près des frontières du Tchad et du Soudan, cette base aérienne, qui remonte à la guerre entre la Libye et le Tchad dans les années 1980, est désormais en cours de transformation pour devenir un hub logistique majeur pour les opérations croissantes de Moscou dans la région du Sahel.
Rénovation des infrastructures et objectifs stratégiques
Sous la supervision de techniciens russes et d’anciens membres des forces syriennes alliées au régime de Bachar El-Assad, la base aérienne fait l’objet d’importants travaux de restauration.
Ces améliorations, notamment la réparation des pistes et des entrepôts, visent à transformer la base en un nœud logistique. Cette initiative reflète l’intention de la Russie de renforcer son ancrage dans la région et d’assurer la connectivité de la chaîne d’approvisionnement vers des zones clés à travers le Sahel et l’Afrique du Nord.
Alliances tribales et influence régionale
En parallèle de la rénovation de la base aérienne, la Russie a intensifié son engagement auprès des communautés tribales dans le sud de la Libye. Ces alliances servent un double objectif : obtenir un soutien local et consolider l’influence de Moscou dans la région. Ce changement illustre une évolution de la stratégie russe, passant d’engagements militaires directs à une approche plus subtile qui tire parti des dynamiques locales pour garantir la stabilité et la sécurité opérationnelle.
Positionnement stratégique en Afrique
La base aérienne de Maaten al-Sarra complète le réseau militaire déjà établi par la Russie en Libye, qui comprend des bases clés telles que :
• Al-Khadim, dans l’est de la Libye
• Al-Jufra, dans la région centrale
• Brak Al-Shati, au sud-ouest de Sabha
• Al-Qardabiya, à Syrte
Ce réseau renforce la capacité de la Russie à projeter sa puissance à travers l’Afrique du Nord, l’Afrique centrale et le Sahel, positionnant ainsi la Libye comme un hub opérationnel et logistique essentiel.
Ce développement s’inscrit dans les objectifs géopolitiques plus larges de Moscou : défier l’influence occidentale, sécuriser l’accès aux ressources africaines et redéfinir les dynamiques de sécurité régionales.
Dynamiques soudanaises
Tout en consolidant sa position en Libye, la Russie a ajusté son approche au Soudan. En se distançant des Forces de soutien rapide (RSF) dirigées par Hemedti et en s’alignant davantage avec Abdel Fattah Al-Burhan, commandant des Forces armées soudanaises, Moscou cherche à établir des partenariats stables dans une région instable. Ce repositionnement met en évidence l’approche pragmatique de la Russie pour maintenir son influence dans le Sahel et au-delà.
Implications pour la stabilité régionale
La revitalisation de Maaten al-Sarra souligne l’importance croissante de la Libye dans la stratégie africaine de la Russie, suscitant des inquiétudes quant à la stabilité régionale. Les nations occidentales et l’OTAN pourraient percevoir ce développement comme un défi à leur influence en Afrique du Nord et au Sahel, des zones cruciales pour la sécurité mondiale et les flux de ressources.
La capacité de Moscou à tirer parti de sa présence militaire, de ses alliances locales et de son réseau logistique souligne son engagement à long terme dans la redéfinition du paysage politique et sécuritaire de l’Afrique.
Alors que la Russie continue d’étendre son empreinte en Afrique, Maaten al-Sarra devient un point central de ses ambitions, avec des implications qui résonneront bien au-delà du Sahel.
Olivier d’Auzon