Le PDG de CMA-CGM alerte sur les effets d'une taxe sur la compétitivité des entreprises
Nouveau tour d'auditions à l'Assemblée nationale sur les superprofits.
Ce mardi, devant les députés de la mission flash sur la fiscalité des entreprises, le patron du géant tricolore CMA-CGM a pris la parole, quelques jours après ses homologues des groupes Engie et TotalEnergies.
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S'il s'est dit ouvert aux discussions sur des efforts supplémentaires pour le pouvoir d'achat des ménages et «pas contre l'impôt» d'une manière générale, Rodolphe Saadé a mis en garde les élus contre les effets néfastes d'une taxe sur les «superprofits», en avançant deux arguments. D'abord, «instaurer une surtaxe française» affaiblirait la compétitivité des entreprises tricolores, face à des concurrents, notamment asiatiques, qui ne seraient pas concernés, a-t-il avancé.
«Si moi, je suis pénalisé car je dois payer un impôt spécial, que font mes concurrents ? Il n'y a pas de raison que je sois le seul, si un impôt doit être acté. Il faut être équitable avec CMA-CGM», a martelé le PDG.
En outre, les profits importants réalisés par l'opérateur sont réinvestis, à «90%», dans l'entreprise, le reste étant reversé aux actionnaires, a détaillé Rodolphe Saadé.
Or, taxer les profits revient à limiter la marge d'investissement du groupe, alors que d'énormes sommes doivent être mises sur la table pour préparer la transition énergétique de CMA-CGM.
Une taxe sur les «superprofits» fragiliserait l'avenir, a argumenté le dirigeant, «dans un secteur crucial pour l'économie et la souveraineté de notre pays».
Plutôt qu'une taxe purement française, l'homme d'affaires a donc plaidé pour qu'un impôt soit mondial, sous peine de désavantager les entreprises tricolores, dont CMA-CGM.
À défaut, la taxe devrait être au moins européenne, ou Bruxelles pourrait décider de revoir la taxe au tonnage, qui permet d'imposer non les bénéfices, mais plutôt les capacités déployées, et touche aussi la concurrence asiatique se rendant dans les ports du continent. «Je ne veux pas avoir des outils différents de mes concurrents», a-t-il insisté, ajoutant que son groupe prévoyait d'investir, cette année, 18 milliards de dollars.
L'opposition de l'homme d'affaires à une taxe française sur les «superprofits» est connue de longue date. «La France est le seul pays à vouloir taxer les armateurs.
Cette taxe serait un avantage donné à mes concurrents», dénonçait-il déjà en juillet, dans nos colonnes.
Avant lui, face aux députés, le patron de TotalEnergies avait aussi lancé un avertissement : «Notre pays souffre de la désindustrialisation [...]. Tout ce que vous faites au Parlement est écouté par l'ensemble des investisseurs», a lancé Patrick Pouyanné, soulignant que des «signaux qui seraient défavorables» à l'investissement risqueraient de limiter l'attractivité des nations.
Malgré des profits records enregistrés depuis le début de l'année par son entreprise, Rodolphe Saadé s'est montré prudent, rappelant que les tarifs de fret, jusqu'à récemment établis à 13.000 dollars le conteneur 40 pieds entre la Chine et l'Europe, se sont effondrés.
«Depuis deux mois, on observe une inversion du marché», a-t-il noté, soulignant l'aspect «cyclique» de son activité.
Le dirigeant a également défendu son entreprise, pointée du doigt pour les «superprofits» engrangés grâce à la hausse des prix : CMA-CGM a «fait beaucoup pour venir en aide au pouvoir d'achat des Français», a-t-il argumenté.
Dernière action en date, en juillet dernier, CMA-CGM avait annoncé une baisse de 750 euros du taux de fret par conteneur 40 pieds, «pour toutes les importations depuis l'Asie de tous ses clients en France». Une position qu'aucun concurrent n'a suivie, a précisé Rodolphe Saadé.
«Je le fais quand je le peux. Je fais déjà beaucoup», a-t-il estimé. Si l'armateur espérait que cette baisse serait perceptible sur les «prix des produits destinés aux consommateurs finaux», son PDG s'est montré dubitatif face aux députés. «Comment partager cette enveloppe de 750 euros ? C'est à l'État de faire ce qu'il faut pour que ces 750 euros arrivent chez le consommateur final», a-t-il répondu, interrogé sur les prix à La Réunion selon Le Figaro .