RDC: les faits marquants de l'année 2022 dans l'est du pays
En 2022, la tension entre la RDC et le Rwanda s’est ranimée, entraînant la Communauté de l’Afrique de l’Est à intervenir pour mettre fin aux agissements des groupes rebelles dans l’est du pays et préserver la paix dans toute la région.
Défait en 2013, le M23, dont les combattants s'étaient réfugiés en Ouganda et au Rwanda, a repris les activités militaires en 2022, reprochant à Kinshasa le non-respect de ses engagements.
La résurgence du M23, qui occupe plusieurs localités dans l'est du pays, a provoqué un regain de tension entre la RDC et le Rwanda.
Kinshasa accuse Kigali de soutenir le M23. Des allégations qui ont toujours été rejetées par le Rwanda. Le président rwandais a accusé en retour le Président Félix Tshisekedi de prendre la crise sécuritaire comme prétexte pour retarder les élections dans son pays.
« S'il essaie de trouver un moyen pour que les prochaines élections soient reportées, je préfère qu'il utilise d'autres excuses plutôt que nous car le Rwanda a déjà beaucoup de problèmes auxquels il fait face », a déclaré le président Kagame.
A ces propos, la réaction de Kinshasa ne s'est pas fait attendre.
Tina Salama, la porte-parole du président Tshisekedi, estime que le président Paul Kagame cherche à diviser les Congolais et rappelle que le processus électoral est en cours.
« Pour ce qui concerne la République démocratique du Congo, le calendrier électoral a été publié par la Commission électorale nationale indépendante, alors l'enrôlement commence sous peu.
Nous avons beaucoup avancé sur ces questions et c'est quand même étonnant de voir que le président Kagamé passe plus de quarante minutes à parler de la République démocratique du Congo. »
Elle met les propos du président Rwandais sur le compte d’une tentative de division des Congolais.
« Nous avons compris tout simplement qu'il laissait plusieurs manœuvres pour tenter de diviser le peuple, qui a répondu favorablement à l'appel à la mobilisation qui a été lancé par le chef de l'État, Félix Antoine Tshisekedi, contre l'agression de notre pays par le Rwanda sous couvert du M23. »
« Votre ennemi est désormais notre ennemi »
Le conflit entre les rebelles du M23 et les Forces armées congolaises engage pratiquement toute la communauté de l'Afrique de l'Est.
Le Kenya, le Burundi et l'Ouganda ont chacun envoyé des troupes dans la zone en conflit.
« La Kenya Defence Forces est une force professionnelle crédible, capable de mener à bien des missions et nous sommes fiers de notre marque », a déclaré le général Kenyan Muteti, Commandant adjoint de l’armée kenyane par intérim qui affirme que le premier contingent fait de grands progrès dans le rétablissement de la paix dans la partie orientale de la RDC.
Ce déploiement intervient alors que les rebelles du M23 ont gagné beaucoup de terrain dans la province du Nord-Kivu.
Des troupes du Burundi et de l'Ouganda ont également été déployées dans le cadre de cette force régionale.
De son côté, le président angolais Joao Lourenço a organisé un mini-sommet le 21 novembre en sa qualité de médiateur de l'Union africaine dans le conflit pour approuver un plan d'action pour la paix en RDC et le rétablissement de bonnes relations entre les deux pays voisins de la région des Grands Lacs.
Le président rwandais Paul Kagame, annoncé à ce sommet, s'est finalement fait représenter par son ministre des Affaires étrangères, Vincent Biruta.
Le sommet, présidé par le président angolais Joao Lourenço, est marqué par l'ultimatum donné au M23 de cesser les attaques contre les Forces armées de la République démocratique du Congo et la Monusco à partir du vendredi 25 novembre 2022 à dix-huit heures.
Les participants à ce sommet approuvent une intervention militaire contre le groupe du M23 s'il n'obtempère pas.
En ce sens, le sommet se prononce en faveur de la poursuite du déploiement de soldats dans le cadre de la force régionale et de l'accélération des efforts de désarmement des milices.
Le 2 décembre, les dirigeants de la région d'Afrique de l'Est entament des pourparlers à Nairobi, au Kenya.
Plus de 200 participants dont des représentants des groupes armés de l'est de la République démocratique du Congo, mais aussi des délégués de la société civile ont répondu présent.
Absent notable, le M23 qui n’a pas été convié aux assises.
Le président en exercice de la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Est, Évariste Ndayishimiye qui a présidé la rencontre, déclare que l'institution sous régionale se mobilise pour la paix et la sécurité dans la partie est de la RDC : "Chers frères et sœurs congolais, votre ennemi est désormais notre ennemi."
Les populations civiles, otages du conflit
Dans ce conflit, c'est la population qui paie le prix fort. L'ancien président kenyan Uhuru Kenyatta, désigné facilitateur de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Est, se rend en novembre auprès des déplacés afin d'évaluer la situation sur le terrain.
« Le facilitateur est venu nous apporter du réconfort. Ça veut dire qu'il y a des gens qui se battent pour nous. Personnellement, ça me redonne de la foi et je me dis que peut-être un jour, nous réussirons », affirme un des déplacés rencontrés sur place.
Uhuru Kenyatta s'est entretenu avec des jeunes déplacés, dont des femmes, présents sur ces sites situés à la portée de la ville de Goma.
«Vous avez vu par vous-mêmes des milliers et des milliers de déplacés. Nous allons faire tout ce qui est possible. On doit continuer à nous réconcilier. Mais je dis s'il vous plaît, mettons un terme à la situation que nous venons de voir», a-t-il déclaré.
Selon Ocha, le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies, 128 000 déplacés se sont installés dans le seul territoire de Nyiragongo, dont plus de 88% vivent dans des centres collectifs et des sites improvisés où ils sont exposés aux maladies.
Le Docteur Thierry Tuhano, médecin-chef de Nyiragongo, confirme : « Présentement, il y a je dirais quatre types de maladies. Les maladies hydriques, dues aux conditions précaires. Deuxième type de maladie, ce sont les maladies à type respiratoires, les infections respiratoires aigües chez les enfants. La grippe aussi chez toutes les catégories de la population. Et troisièmement, il y a le paludisme. Il y a enfin la malnutrition qui est notée déjà dans nos consultations. »
Les Nations unies, de leur côté, exhortent les autorités de la RDC à enquêter sur le meurtre de plus de 130 villageois par les rebelles du M23 en novembre.
Abdoul Aziz Thioye, directeur du bureau conjoint des droits humains en RDC, précise : "L'enquête a permis de confirmer que les rebelles du M23 ont été les auteurs de la mort d'au moins 131 civils à Kishishe et Bambo, deux villages du territoire de Rutshuru, dans la province du Nord-kivu.
Les victimes ont été exécutées arbitrairement par balles ou à l'aide d'armes blanches. 8 personnes ont par ailleurs été blessées par balles et 60 autres enlevées. Au moins 22 femmes et 5 filles ont été victimes de viol."
Le M23 réfute l'accusation à son encontre et parle de huit civils morts par balles perdues.
Une lueur d’espoir pour la paix ?
Les rebelles du M23, l'un des principaux groupes armés dans l'est de la République démocratique du Congo, ont déclaré qu'ils étaient prêts à se retirer des territoires de la région.
Le groupe rebelle, qui a pris des pans entiers de territoire à Rutshuru et Nyiragongo ces derniers mois, a également demandé à rencontrer la force régionale de l'Afrique de l'Est ainsi que les médiateurs du processus de paix mené par les dirigeants régionaux.
Une déclaration de Lawrence Kanyuka, le porte-parole politique du M23 ajoute que le groupe rebelle soutient les efforts régionaux visant à trouver une solution durable à l'instabilité dans l'est de la République démocratique du Congo.
Selon Willy Kalengayi, analyste politique congolais, la rencontre de Luanda en Angola a ouvert la porte à une sortie de crise avec sa résolution ordonnant le retour de tous les réfugiés dans leur pays d'origine.
"En décidant que tous les réfugiés rentrent chez eux, on enlève le prétexte à tous les pays voisins de venir faire la guerre au Congo en disant qu'il y a l'insécurité qui partirait du Congo", affirme l'analyste.
"A l'Ouganda, on enlèverait le motif de l'ADF, au Rwanda on enlèverait le motif du FDLR et il n'y aura plus de raison de faire la guerre. Tous ces pays ont des décisions prises pour attaquer effectivement le Congo et créer l'insécurité", conclut-il.
Des prochaines rencontres sont déjà prévues à Goma, Bukavu, Bunia en janvier 2023 pour évaluer les avancées de cette feuille de route et planifier les actions.
Dans son discours de fin d'année à la nation, le président congolais a appelé ses compatriotes à mettre les divergences de côté afin de sauver le pays. Selon TaboolaNews.