Sommet des BRICS en Russie : l'Occident doit tenir compte de l'appel à un nouvel ordre mondial
Le Sommet des BRICS qui s’ouvre demain à Kazan, en Russie, permet à Poutine de montrer qu’il n’est pas isolé.
Mais c’est surtout le pouvoir d’attraction de ce « club » des pays émergents qu’il faut voir, dans un monde dominé par les Occidentaux depuis 1945 et qui a du mal à évoluer.
Que diriez-vous de faire partie du même club que Vladimir Poutine ? Vous hésitez… Mais le Sommet des BRICS qui s’ouvre demain dans la ville russe de Kazan, au bord de la Volga, montre que bon nombre de pays n’hésitent pas, malgré l’invasion de l’Ukraine.
Les BRICS, c’est ce club fondé il y a deux décennies par le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, bientôt rejoints par l’Afrique du Sud, les pays dits « émergents ». A leur Sommet de Johannesburg l’an dernier, ils ont admis de nouveaux membres, dont l’Iran, les Émirats arabes unis, l’Égypte, et l’Éthiopie.
L’Arabie Saoudite a été invitée mais hésite ; tandis que l’Argentine de Javier Millei a carrément refusé. La liste des candidats aux BRICS est longue, y compris la Turquie, pays membre de l’OTAN.
D’ores et déjà, les BRICS revendiquent près de la moitié de la population de la planète, contre à peine 10% au G7 occidental, et 35% du PIB mondial, plus que le G7. Ça n’en fait pas, ou pas encore, un contre-pouvoir global, mais un des lieux qui comptent à un moment de redéfinition de l’ordre mondial.
Il y a deux manières d’observer ce Sommet. Le premier est de le voir par le prisme de l’Ukraine : Poutine prouve qu’il n’est pas un paria, que des chefs d’État et pas seulement son ami chinois Xi Jinping, s’affichent sans hésiter à ses côtés.
Pour le président russe, c’est un indéniable succès, surtout au moment où Volodymyr Zelensky tente de mobiliser autour de son « plan de la victoire ». Après deux ans et demi de guerre, l’Ukraine et les Occidentaux n’ont pas réussi à inverser le rapport de force.
Mais il y a un autre prisme pour analyser le Sommet de Kazan, c’est celui de l’émergence de la demande des pays du Sud pour un ordre mondial différent de celui que les Occidentaux, et surtout les États-Unis, ont défini à leur image en 1945. Malgré toutes les ambigüités des BRICS, il ne faut pas sous-estimer ce message.
Les BRICS ne sont pas un bloc cohérent, ça fait partie des ambiguïtés. On peut disserter sur l’hostilité entre l’Inde et la Chine, le poids décisif de l’économie chinoise, la présence de l’Iran, ou la difficulté du bloc à pousser à la dé-dollarisation de l’économie mondiale. Mais ces ambiguïtés n’ont pas empêché les BRICS de grossir, d’attirer de multiples candidatures, d’être porteurs d’une symbolique alternative.
Ce qui unit les BRICS, c’est l’hostilité à un ordre mondial qui fait encore la part trop belle aux Occidentaux. Mais tous ceux qui participent au club ne veulent pas forcément le remplacer par un ordre chinois, ou avoir Poutine comme protecteur ou gardien de la morale.
Mais l’impossibilité de réformer l’ordre mondial, ainsi que la perception forte du « deux poids, deux mesures » occidental à travers le conflit du Proche-Orient, ouvrent un boulevard aux tenants des BRICS ; à commencer par la Chine et son OPA sur le « Sud Global ».
Pour cette raison, les Occidentaux ne devraient pas ignorer le message de Kazan, sous peine de se réveiller avec un monde qui leur échappe.