Le succès sur TikTok d'une pilule minceur inquiète les médecins et les autorités
Sur TikTok, le mot-clé #Ozempic culmine à plus de 500 millions de vues : cet antidiabétique fait fureur sur le réseau social pour ses propriétés amaigrissantes.
En France, le phénomène engendre des tensions d’approvisionnement et inquiète médecins et autorités.
« J’ai commencé Ozempic il y a six semaines », raconte une tiktokeuse américaine dans une vidéo vue près de 100 000 fois. En legging et brassière de sport, la jeune femme, visiblement bien plus mince que sur ses photos d’« avant » continue : « Je n’ai fait aucun exercice, je me suis juste injecté le produit ! ».
Un traitement anti-diabétique commercialisé en France depuis 2019
L’Ozempic, remède miracle ? Ce produit injectable est en fait indiqué pour « le traitement du diabète de type 2 insuffisamment contrôlé » chez les adultes, précise le laboratoire Novo Nordisk, qui le commercialise en France depuis 2019.
Le sémaglutide, son principe actif, agit en se fixant sur les récepteurs d’une hormone qui a un rôle dans le contrôle de la glycémie et stimule la libération d’insuline lorsque le taux de glucose dans le sang est élevé. Il ralentit aussi la vidange de l’estomac, diminuant de fait l’appétit et engendrant des pertes de poids importantes, de l’ordre de 10 % en un an.
Un dérivé utilisé pour aider les personnes obèses
Une propriété qui a permis à l’industriel d’obtenir la commercialisation du sémaglutide dans de nombreux pays, dont les États-Unis, à une dose plus forte et sous un autre nom, Wegovy, pour le traitement de l’obésité.
En France, le Wegovy a reçu un avis favorable de la Haute autorité de santé (HAS) dans le traitement de l’obésité fin décembre. Il est pour le moment limité aux personnes très obèses avec une maladie associée.
Des ordonnances falsifiées
En attendant une décision des autorités sur son prix et son remboursement, Wegovy est délivré au compte-gouttes, « contrairement à l’Ozempic qui est disponible avec une ordonnance normale », constate le professeur Jean-Luc Faillie, de l’université de Montpellier.
Résultat : « des pharmaciens ont constaté des ordonnances » d’Ozempic pour des personnes non diabétiques ainsi que « des ordonnances falsifiées, utilisées par plusieurs personnes ».
Mercredi, l’Agence nationale du médicament (ANSM) et l’Assurance maladie en France ont annoncé que l’Ozempic allait faire l’objet d’une « surveillance renforcée », expliquant que « des remontées de terrain font état d’un usage détourné ».
Des détournements « limités » à 1 % selon ces autorités, qui s’inquiètent toutefois de l’impact sur la disponibilité du produit pour les diabétiques.
Novo Nordisk admet que sa « capacité d’approvisionnement actuelle ne répond pas toujours à la demande excédentaire » et déplore « une disponibilité intermittente et des ruptures de stock périodiques ».
L’Ozempic, pas un médicament magique
Jean-François Thébaut, de la Fédération des diabétiques, s’inquiète d’une éventuelle « ruée » des Français sur le Wegovy quand il sera plus largement disponible sur le marché national, d’autant que le sémaglutide est « extrêmement efficace » contre le diabète.
La spécialiste de l’obésité Karine Clément, de l’Inserm, insiste sur la nécessité, alors, de « bien cadrer sa prescription ». « Il ne s’agit pas d’un médicament magique. Comme toujours dans l’obésité, il doit être accompagné d’une prise en charge globale. »
Des effets secondaires
Dans son communiqué de mercredi, l’ANSM met aussi en garde : l’Ozempic peut « entraîner des effets indésirables potentiellement graves, tels que des troubles gastro-intestinaux, des pancréatites ou des hypoglycémies ».
Des effets secondaires « sous-notifiés » selon le professeur Faillie, en charge de sa pharmacovigilance. « C’est le problème du’hors des clous’: ni les patients ni les prescripteurs ne sont motivés pour déclarer » d’éventuels effets secondaires.
Outre des nausées, « il existe aussi des risques plus rares mais plus graves comme des pancréatites aiguës, qui peuvent survenir même à doses faibles, des troubles biliaires, de rares cas de constipation sévère qui peuvent conduire à l’obstruction intestinale », relève-t-il, pointant aussi un « risque accru de cancer de la thyroïde » après plusieurs années de traitement, rapporte ouest France.