Tensions au large de Taïwan : La Chine lance de vastes manœuvres militaires
Au lendemain de l'investiture de Lai Ching-te à la présidence de Taïwan, la Chine a déclenché ce jeudi à 07h45 ses plus grandes manœuvres militaires depuis un an dans le détroit de Taïwan.
Cette opération, nommée Joint Sword 2024A, est une réponse directe aux forces indépendantistes de l'île, selon le porte-parole du Théâtre Est de l'Armée Populaire de Libération (APL).
Les manœuvres, qui se dérouleront jusqu'à vendredi, impliquent des avions et des navires de combat déployés autour de Taïwan, simulant un blocus de l'île de 23 millions d'habitants. L'objectif affiché est de «tester les capacités de combat réel conjointes» de la marine, de l'armée de l'air et de l'unité des fusées de l'APL. Taipei a immédiatement dénoncé ce «comportement militaire provocateur» et a fait décoller en urgence ses chasseurs, notamment des Mirage 2000 de la base de Hsinchu, près de la capitale.
Ces exercices surviennent trois jours après l'arrivée au pouvoir de Lai Ching-te, élu en janvier dernier. Cette démonstration de force vise à envoyer un message clair au nouveau dirigeant et à ses soutiens occidentaux, en particulier les États-Unis. L'APL a qualifié ces manœuvres d'«avertissement sévère contre l'ingérence des forces extérieures», en référence à l'approbation par l'administration Biden de ventes militaires à Taipei pour un montant de 300 millions de dollars, juste avant les élections du 13 janvier.
Pékin accuse Lai, qualifié par le passé de «dangereux séparatiste», d'avoir implicitement avoué son soutien à l'indépendance lors de son discours d'investiture le 20 mai. Cependant, Lai s'est abstenu de franchir cette «ligne rouge», adoptant une position similaire à celle de son prédécesseur, Tsai Ing-Wen, en défendant l'identité démocratique de l'île. Bien qu'il se soit présenté comme un «artisan de l'indépendance» par le passé, Lai a modéré son discours durant sa campagne, promettant de défendre le statu quo dans le détroit tout en résistant aux «menaces extérieures» et en promouvant la démocratie. Il a également appelé à une relance des «échanges humains» avec la Chine, malgré l'interdiction actuelle pour les ressortissants chinois de visiter l'île.
La Chine intensifie depuis plusieurs années ses incursions aériennes dans la zone de défense aérienne taïwanaise (ADIZ), ses chasseurs et bombardiers franchissant régulièrement la ligne médiane du détroit depuis la visite de Nancy Pelosi à Taipei en août 2022. Toutefois, ces activités avaient été réduites ces derniers mois à l'approche des élections pour ne pas effrayer les électeurs et durant la période de transition du pouvoir, attendant avec anxiété la première allocution publique de Lai Ching-te.
La situation reste tendue alors que Taïwan tente de naviguer entre les pressions militaires de la Chine et les attentes de la communauté internationale. L'évolution des relations entre Taipei et Pékin sera suivie de près dans les semaines et mois à venir, chaque mouvement militaire et déclaration politique ayant le potentiel de modifier l'équilibre fragile de cette région stratégique.