Tchad : Amnesty International réclame justice pour les proches de Yaya Dillo Djerou détenus au secret
Amnesty International a exhorté les autorités tchadiennes à garantir un procès équitable pour 26 personnes, membres de la famille du leader de l'opposition Yaya Dillo Djerou, détenues au secret depuis plus de trois mois.
Ces individus ont été arrêtés lors d'un raid sur le siège du Parti Socialiste Sans Frontières (PSF) à N'Djamena le 27 février 2024, au cours duquel Yaya Dillo Djerou a été tué.
Des détentions arbitraires et des conditions préoccupantes
Les 26 détenus, parmi lesquels se trouvent trois enfants et plusieurs personnes souffrant de maladies chroniques, sont incarcérés à la prison de haute sécurité de Koro Toro, située à 600 kilomètres de N'Djamena. Amnesty International souligne que ces détenus n'ont toujours pas été présentés devant un juge ni autorisés à consulter un avocat. Un membre de la famille, souhaitant garder l'anonymat, a déclaré : « Nous n’avons aucune communication avec elles ni aucune nouvelle ».
Samira Daoud, Directrice régionale d'Amnesty International pour l'Afrique de l'Ouest et centrale, a exprimé sa préoccupation : « Nous demandons aux autorités tchadiennes de respecter leurs obligations en les présentant à un juge, en leur permettant de désigner l’avocat de leur choix et en les maintenant en détention non loin de leur famille. Les personnes qui en ont besoin doivent pouvoir bénéficier sans délai de soins de santé adéquats. »
Contexte de l'attaque et absence d'enquête
L'assaut contre le siège du PSF a été décrit par les autorités comme un échange de tirs, tandis que les partisans de Dillo Djerou parlent d'un assassinat. Les autorités avaient accusé les partisans de Dillo Djerou d'avoir attaqué le siège de l’Agence nationale de sécurité pour libérer Abakar Torabi, secrétaire chargé des finances du PSF. Torabi avait été arrêté pour son implication présumée dans une attaque contre le siège de la Cour suprême le 19 février 2024. Les partisans de Dillo Djerou rejettent ces accusations.
Le Premier ministre Succès Marsa avait promis une enquête internationale sur cette attaque, mais aucun détail n'a été rendu public à ce jour. Pendant ce temps, le siège du PSF a été rasé, et les autorités judiciaires n'ont fourni aucune information sur les 26 personnes arrêtées le jour de l'assaut.
Un schéma de répression
Ces détentions s'inscrivent dans un contexte de répression accrue des partisans de l'opposition au Tchad depuis avril 2021, lorsque les autorités de transition ont pris le pouvoir après la mort du président Idriss Déby. En octobre 2022, 128 manifestants ont été tués et des centaines arrêtés lors d'une manifestation. Ceux-ci ont été détenus à Koro Toro et condamnés à des peines de prison, souvent sans respect des droits à un procès équitable. En mars 2023, 259 prisonniers ont été graciés, et une loi d’amnistie générale a été adoptée en novembre 2023.
Samira Daoud a conclu : « Ces cas de détention arbitraire et au secret vont à l’encontre du droit national et international relatif aux droits humains. Nous appelons les autorités tchadiennes à mettre fin à ces pratiques inacceptables et à respecter les obligations et les engagements du pays en matière de droits humains. »
Amnesty International continue de surveiller la situation et appelle à une action rapide pour garantir les droits des personnes détenues.