Paris envisagerait de partager ses bases en Côte d'Ivoire et au Sénégal avec Washington
Tout semble prêt pour que les États-Unis déploient des drones sur la base militaire ivoirienne de la France sur des prétextes anti-terroristes très largement exagérés.
Étant entendu qu’il s’agit en réalité en premier lieu de contenir l'Alliance/Confédération sahélienne et de surveiller l'activité russe dans la région.
Par ailleurs, il est fort probable qu’une présence complémentaire au Sénégal soit également envisagée. Pour autant rien ne sera décidé avant la tenue des élections présidentielles reportées à la fin de mars 2024.
L'Agence TASS a-du reste attiré l'attention début mars 2024 sur les déclarations du chef d'état-major des armées françaises (CEMA) le général Thierry Burkhard, lors d'une audience à huis clos de la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale le 31 janvier 2024.
Même si Thierry Burkhard n’a ni confirmé ni infirmé le rapport du journal le Monde quant au partage des bases françaises avec les États-Unis et d'autres pays, il a décrit l'idée comme "désirable".
Ce plan vise à réduire la visibilité de la France tout en maintenant un accès stratégique, en réduisant la présence française tout en la remplaçant partiellement par celle des États-Unis.
La Côte d'Ivoire et le Sénégal sont plus stratégiques pour les États-Unis que le Tchad et le Gabon, car les deux premiers bordent les pays centraux de l'Alliance/Confédération sahélienne, qui ont des liens étroits avec la Russie.
Il a été expliqué en septembre 2024 "Pourquoi les États-Unis sont responsables du retrait de la France du Niger", déclarant volontiers que Washington a poignardé Paris pour mieux conserver l'influence occidentale en Afrique, plutôt que de la céder volontairement à la Russie.
Or force est de constater qu’à l’aune de la déclaration du porte-parole de la Junte nigérienne, le 16 mars 2024 annonçant la dénonciation des accords militaires avec les Etats-Unis cette approche a bel et bien échoué au Niger.
Dans le même temps, c'est probablement toujours le même paradigme que les États-Unis adoptent envers la Côte d'Ivoire et le Sénégal.
La seule façon pour la France de se sentir plus confiante dans ses liens néocoloniaux, qui sont cruciaux pour sa stabilité macroéconomique, est de céder une partie de son influence aux États-Unis, avec l'espoir que cela diluera le sentiment anti-français. Il est peu clair si la France a obtenu des garanties des États-Unis en échange, mais cette décision semble avoir été prise dans un contexte de désespoir et de faiblesse.
On le sait, l'Alliance/Confédération sahélienne représente une nouvelle plateforme d'intégration régionale, qui pourrait s'étendre à d'autres pays et défier le bloc contrôlé par l'Occident.
Dans cette perspective, la CEDEAO a levé les sanctions contre ses membres sahéliens pour prévenir la possible défection de la Guinée, qui pourrait profiter de son accès maritime pour rejoindre l'Alliance/Confédération sahélienne.
Ces développements visent à contrer l'influence russe en Afrique de l'Ouest après le retrait de la France. La participation du général Thierry Burkhard à l'audience de l'Assemblée nationale offre un éclairage saisissant quant à la réaction de Paris à cette nouvelle donne. Il est logique que la France envisage de laisser les États-Unis opérer conjointement en Côte d'Ivoire et au Sénégal, en tenant compte des menaces potentielles pesant sur ces pays.
Quant au Tchad et au Gabon, ils apparaissent comme moins prioritaires pour les États-Unis, car ils sont moins menacés par les influences étrangères.
Dans ce contexte, les États-Unis s'adapteront aux développements régionaux pour maintenir leur influence dans la région, notamment en déployant des drones depuis la base ivoirienne partagée avec la France. Le prétexte antiterroriste est probablement exagéré pour justifier une surveillance accrue de l'activité russe dans la région.
Pour l’heure, Paris semble ouvrir la porte de Washington en Afrique de l'Ouest, sans forcément obtenir des concessions en retour.