Consultant auprès de l'ONU à "Al-Ain News": le grand bluff autour de l'intervention militaire au Niger
Dans un entretien à "Al Ain News", le Consultant juriste auprès des Nations Unies, de l'Union européenne et de la Banque mondiale, Olivier d'Auzon est revenu sur le dernier coup d'État au Niger.
Tandis que les membres de la CEDEAO ont brandit la menace d’une intervention militaire en activant « la force en attente » pour rétablir l'ordre constitutionnel au Niger, Paris a de son côté apporté « son plein soutien à l'ensemble des conclusions » de la CEDEAO et réitéré « sa ferme condamnation de la tentative de putsch en cours au Niger.
Et Washington soutenait « le leadership et le travail de la CEDEAO » pour le « retour à l'ordre constitutionnel ».
Qu'elle est la position d'Alger vis-à-vis du conflit au Niger ?
Dans le même temps, Alger utilisait tous les canaux y compris le levier diplomatique pour faire valoir et militer pour l’absence de réponse militaire dans le cadre de la CEDEAO
De fait, après la visite de son ministre des Affaires étrangères aux États-Unis, la presse algérienne revendiquait bel et bien un alignement des positions de la Maisons- Blanche et d’Alger sur la question.
C’est en tous cas, ce que laisse transparaître la Une du quotidien algérien l’Expression, le 10 août 2023 : “Alger et Washington se mettent d’accord”.
Dans cette perspective, les deux capitales privilégiaient des “solutions pacifiques plutôt que le choix de l’intervention militaire porteur de dangers”.
En l’occurrence, il n’y a rien d’étonnant à cette posture, à l’aune du déplacement à Washington du ministre des Affaires étrangères algérien, Ahmed Attaf, qui y a rencontré son homologue américain, Antony Blinken, le 9 août 2023.
En outre, elle confirmait la déclaration du Président Algérien Abdelmadjid Tebboune qui militait justement pour l’absence d’intervention militaire. Et pour le justifier, il avançait que son pays partageait une frontière de près 1 000 kilomètres avec le Niger.
Or la position d’Alger a semble-t-il fortement infusé dans la tête des dirigeants Ouest Africains et Occidentaux, car il est désormais plus certain que le rétablissement de Mohamed Bazoum, soit une condition à exiger aux putschistes par la CEDEAO. Dés lors Washington et l’Union européenne paraissent bien divisés, révèle Africa Intelligence.
Qu'en est-il de la position de Washington ?
A ce titre, Washington qui se montre rétissant quant à une intervention militaire, tient à préserver ses intérêts et à consolider ses acquis, notamment ses installations dans la base aérienne 201, dans la région d’Agadez, d’où opèrent des drones, aéronefs de surveillance et systèmes de renseignement techniques, sans oublier un contingent militaire stationné sur l’aéroport de Niamey.
Washington entend se montrer pragmatique. Son approche vise à s’appuyer sur le général Barmou dans l’espoir de contrer le dessein russe du général Modi, qui pourrait se rendre à Moscou dans les prochaines semaines. Par ailleurs, on soulignera volontiers que le Président américain, Joe Biden s’est farouchement opposé au financement de l’opération militaire.
Et en ce qui concerne Paris ?
Quant à Paris, il se retrouve « cornérisé » car il a misé sur la Facilité européenne pour la paix (FEP), et ce projet ne pourra pas voir le jour car l’Union européenne est particulièrement divisée sur la question nigérienne.
Quoiqu’il en soit, Paris devra trancher sur le sort qu’elle réservera à ses 1 500 militaires présents sur le territoire Nigérien.
Par ailleurs, le Secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken a estimé le 8 août 2023 à l’antenne de la BBC que « le départ forcé » de M. Bazoum n'avait pas été "fomenté par la Russie ou par Wagner", mais averti que le groupe russe de mercenaires "essaierait d'en tirer profit".
Dés lors, on soulignera volontiers que l’expression « départ forcé » par Anthony Blinken tend à montrer que Washington que le Putsch est acté tandis que Paris, n’écarte pas l’espoir de la restauration de Mohammed Bazoum.
Et quant aux tergiversations de la CEDEAO, faute de soutien occidental, l’intervention militaire n’ira pas bien loin. Force est de constater que ces circonstances ne militent assurément pas pour Mohamed Bazoum- le temps joue contre lui, par contre, gageons qu’elles profiteront à la Russie et à Wagner.