Attaque du 7 octobre 2023 : la France face à la guerre de Gaza
Depuis 2005, Israël semblait vivre dans une relative normalité. La série d'attaques associées à la deuxième Intifada était terminée.
Quelques incidents sporadiques se produisaient, principalement à Jérusalem, souvent impliquant des armes rudimentaires comme des couteaux.
Des tensions surgissaient sur l'Esplanade des mosquées et des tirs de roquettes de la bande de Gaza perturbaient la vie des résidents de Sderot, la ville israélienne la plus proche.
Pendant ce temps, les colonies israéliennes continuaient de s'étendre, rendant de plus en plus difficile la réalisation d'un État palestinien. Malgré tout cela, le calme en surface et le sentiment de déni persistaient.
Israël renforçait sa puissance militaire et sa position diplomatique, notamment avec les nations arabes, grâce aux accords de paix et aux accords d'Abraham, offrant un espoir de normalisation totale.
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Le conflit avec les Palestiniens était qualifié de « basse intensité » et relevait davantage d’actions policières voire d’interventions ponctuelles de l’armée qui, régulièrement, « tondait le gazon » à Gaza. Le pays passait pour invulnérable. Le seul problème pour sa sécurité était selon ses dirigeants « la menace existentielle » représentée par l’Iran.
Nombre de pays occidentaux étaient dans le même état d’esprit, se contentant rituellement de condamner l’extension des colonies de peuplement et d’évoquer « la solution des deux États » sans accompagner ces déclarations d’actions significatives.
La plupart des pays arabes partageaient cette attitude. Une certaine « fatigue » prévalait. Les connaisseurs de cette région, notamment français, ne manquaient pas de souligner que ce calme apparent était trompeur et qu’en l’absence d’un règlement, la question palestinienne était « une bombe à retardement ».
Le massacre le 7 octobre dernier commis par le Hamas dans des conditions atroces avec la mort de 1 200 personnes et la prise de près de 240 otages ont sonné le réveil tragique de la question palestinienne.
Le choc sur la population israélienne a constitué un véritable traumatisme, car pour la première fois depuis 1948, la guerre survient sur son territoire et la population civile israélienne se trouve directement impliquée.
En fait, la dissuasion que pensait avoir mise en place Israël tant vis-à-vis des pays arabes que des Palestiniens s’est révélée illusoire : le Hamas n’a pas été empêché de procéder à une attaque armée d’envergure et a franchi aisément la barrière de sécurité qui entourait Gaza ; les services de renseignements n’ont pas décelé l’ampleur de l’agression ; l’armée surprise n’a réagi qu’avec retard.
Si le gouvernement Netanyahou défaillant a été gravement mis en cause par l’opinion publique, la création d’un cabinet de guerre avec des membres de l’opposition a permis d’assurer, tout au moins provisoirement, une unité nationale, perturbée cependant par une controverse sur la question des otages.
Une fois le premier choc passé, la réaction a été la proclamation d’une « guerre totale », quel qu’en soit le prix, avec pour objectif d’« éradiquer » le Hamas. Avec la mobilisation de plus de 300 000 réservistes, c’est toute la population qui se sent engagée dans cette guerre.
Le déluge de feu qui s’est abattu sur la bande de Gaza, densément peuplée de 2,4 millions d’habitants bloqués dans cette prison à ciel ouvert, avait pour objectif de détruire les infrastructures du Hamas, notamment les tunnels aménagés. Mais il a provoqué le chaos et un cauchemar humanitaire.
L’offensive terrestre menée essentiellement par des troupes d’élites qui a pour but de débusquer et éliminer les 20 à 30 mille combattants des brigades Ezzedine al-Qassam risque d’être longue et meurtrière de part et d‘autre.
Selon les chiffres du Hamas jugés crédibles par les Nations unies et les ONG, on décompte déjà, après plus de quatre mois de combats, plus de 28 000 victimes dont les deux tiers seraient des femmes et des enfants et près de 70 000 blessés auxquels il faut ajouter les morts restés sous les décombres.
Les dégâts matériels sont d’ores et déjà énormes, près des deux tiers des bâtiments et des infrastructures de la bande de Gaza auraient été détruits ou endommagés.
Au nord du territoire, la ville de 35 000 habitants de Beit Hanoun a été totalement rasée, selon les journalistes qui ont accompagné l’armée israélienne. La conférence de Paris du 9 novembre 2023 a souligné l’ampleur du désastre humanitaire pour la population, dépourvue de nourriture, d’eau, d’essence, de médicaments, et même d’abris, suscitant l’indignation du secrétaire général des Nations unies, des ONG, de nombreux pays, notamment arabo-musulmans, et du « Sud global ».