Vidéo.. Quand un don de blé russe à la Centrafrique sème la zizanie au Cameroun
L’arrivée mi-décembre au port de Douala de 50 000 tonnes de blé russe données à la Centrafrique provoque des tensions chez les meuniers camerounais et alimente des soupçons de fraude.
En faisant preuve de générosité en juillet dernier, lorsqu’il recevait ses homologues africains à Saint-Pétersbourg, le président russe Vladimir Poutine ne pouvait se douter qu’un simple don de blé viendrait semer la pagaille dans le monde des moulins au Cameroun.
Pourtant, au regard des tractations et tensions observées ces dernières semaines dans le secteur, c’est bien ce qui est en train de se produire.
À l’origine de cette affaire, la concrétisation d’une promesse faite lors du dernier sommet Russie-Afrique de livrer gratuitement des céréales à six pays africains, dont la Centrafrique. Un geste diplomatico-économique répondant aux difficultés d’approvisionnement de nombre de pays du continent, dépendants des importations de blé pour produire leur pain et subissant la hausse du coût de ces achats depuis la pandémie de Covid-19 et surtout la guerre en Ukraine, selon Jeune Afrique.
Pas de minoterie en Centrafrique
C’est ainsi que le 15 décembre un bateau contenant la première partie d’une cargaison de 50 000 tonnes de blé promise à Bangui accoste au port de Douala. Le reste du chargement, qui devait initialement arriver fin décembre, a finalement atteint la capitale économique camerounaise ces derniers jours. Problème, la Centrafrique, pays enclavé, en proie à l’insécurité et où 50 % de la population ne mange pas à sa faim selon l’Organisation des nations unies (ONU), ne dispose pas de minoterie sur son territoire pour transformer les céréales en farine.
Sachant qu’il faut huit mois pour transformer l’ensemble du chargement, ce qui nécessite de louer des entrepôts de stockage à Douala et engendre d’autres frais logistiques, le calcul de Bangui est rapidement fait et une autre solution est envisagée. Le 21 décembre, le directeur général des douanes et des droits indirects centrafricain, Frédéric Théodore Inamo, saisit son homologue camerounais, Edwin Fongod Nuvaga, pour obtenir l’autorisation de vendre ce blé sur place au Cameroun. Avec le fruit de la vente, Bangui pourrait ensuite racheter une partie de la farine moulue à Douala, qui serait expédiée vers le marché centrafricain.
Rôle des douanes
Selon Jeune Afrique, certains acteurs de la place, dont la Société des céréales du Cameroun (SCC), filiale du groupe local Kadji et membre du GIMC, seraient tentés de faire cavalier seul et disposés à conclure un deal avec Bangui. Sollicitée, la SCC n’est pas revenue vers nous avant la publication de cet article. Elle compte parmi ses clients Africa Food Manufacture (AFM), branche agroalimentaire du groupe Beetle Heritage fondé par Évariste Helle, entrepreneur camerounais également présent dans l’éducation et la logistique portuaire.