Quels sont les "chantiers prioritaires" du future président du Sénégal Bassirou Diomaye Faye ?
En passe de devenir le plus jeune président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, 44 ans, est bien parti pour remporter l'élection présidentielle après que le candidat du pouvoir Amadou Ba a concédé sa défaite, ce lundi 25 mars 2024…
En fait, Bassirou se voulait "candidat du changement de système" au Sénégal. On l’appelle toujours au Sénégal candidat « antisystème ».
Selon les résultats partiels publiés dans les médias et sur les réseaux sociaux placent Bassirou Diomaye Faye nettement devant son principal rival, et très loin devant les autres.
Pour sa part, Bassirou Diomaye Faye a assuré lundi que son pays resterait "l'allié sûr et fiable" de tous les partenaires étrangers "respectueux", lors de sa première apparition publique depuis ces résultats. "Je voudrais dire à la communauté internationale, à nos partenaires bilatéraux et multilatéraux que le Sénégal tiendra toujours son rang, il restera le pays ami et l'allié sûr et fiable de tout partenaire qui s'engagera avec nous dans une coopération vertueuse, respectueuse et mutuellement productive", a-t-il dit dans une déclaration à la presse.
"Je lance un appel à nos frères et sœurs africains pour qu'ensemble nous consolidions les acquis obtenus dans les processus de construction de l'intégration de la Cédéao tout en corrigeant les faiblesses et en changeant certaines méthodes, stratégies et priorités politiques", a-t-il dit. En l'élisant, "le peuple sénégalais a fait le choix de la rupture" avec le système en place, a-t-il dit.
La réconciliation nationale
Sur le plan intérieur, il a indiqué que ses "chantiers prioritaires" seraient "la réconciliation nationale", la refondation des institutions" et "l'allègement sensible du coût de la vie". Il s'est aussi engagé à "combattre la corruption à toutes les échelles".
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Alors qu'il n'a jamais exercé le moindre mandat d'élu, il avait été désigné en novembre 2023 candidat pour remplacer Ousmane Sonko, dont il était le second à la tête du parti Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité (Pastef) dissous quelques mois auparavant par les autorités.
Macron félicite Faye
"Félicitations à Bassirou Diomaye Faye pour son élection comme Président de la République du Sénégal. Je lui adresse tous mes vœux de réussite et me réjouis de travailler avec lui", a écrit le président français Emmanuel Macron sur le réseau social X.
Emprisonné depuis avril 2023 pour outrage à magistrat, diffamation et actes de nature à compromettre la paix publique, Bassirou Diomaye Faye a pourtant manqué une large partie de la campagne officielle qui s'était ouverte le 9 mars. Il a même été empêché d'enregistrer ses messages de propagande électorale pour la télévision publique.
Mais il a finalement été libéré le 15 mars, neuf jours avant le premier tour de la présidentielle, après l'adoption d'une loi d'amnistie voulue par le président Macky Sall.
Ousmane Sonko : Bassirou, c’est moi
"Diomaye mooy Ousmane" ("Diomaye c'est Ousmane"). Tels étaient les mots des supporters, en langue wolof, lors de la campagne présidentielle. Pour eux, Bassirou Diomaye Faye et l'opposant Ousmane Sonko sont indissociables. "Bassirou, c'est moi", a dit également au sujet de son lieutenant Ousmane Sonko, troisième de la présidentielle en 2019 et frappé d'inéligibilité en 2024 après trois ans de bras de fer avec le pouvoir.
Modeste famille d’agriculture
Issu d'une modeste famille d'agriculteurs, Bassirou Diomaye Faye a passé le concours de l'Ena (école nationale d'administration) au Sénégal. Devenu inspecteur des impôts, il fait la connaissance d'Ousmane Sonko aux Impôts et Domaines. "Diomaye" l'a suivi au Syndicat autonome des agents des Impôts et Domaines qu'il avait créé. Il a ensuite rejoint le Pastef, dont il a d'abord été l'invité avant d'en devenir un incontournable et le secrétaire général, selon le parti, qui le décrit comme "un esprit brillant", "froid dans l'analyse". Pressentant la disqualification d'Ousmane Sonko à la présidentielle, leur camp a fait de lui son champion.
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"Ils sont deux faces d'une même pièce avec deux styles différents", décrit Moustapha Sarr, un formateur des militants du Pastef.
Ousmane Sonko, 49 ans, était le candidat incontestable du parti Pastef qu'il a contribué à créer en 2014 avec des jeunes se disant étrangers à la politique. Sa disqualification en janvier par le Conseil constitutionnel a fait sortir de son ombre son second, le beaucoup plus discret Bassirou Diomaye Faye.
Nouvelle génération
Souvent vêtu d'un boubou blanc traditionnel, de taille moyenne, portant une barbichette sous son visage juvénile, Bassirou Diomaye Faye s'est présenté sur scène lors de son dernier meeting électoral en compagnie de ses deux épouses, une première pour un président sénégalais.
Contre l'hyperprésidentialisme, ce musulman pratiquant s'affiche comme l'incarnation d'une nouvelle génération de politiciens. Il met en avant ses valeurs panafricaines, sa volonté de préserver la souveraineté de son pays, de répartir plus justement les richesses et de réformer une justice qu'il juge corrompue. Pour marquer sa "transparence", il a publié sa déclaration de patrimoine le dernier jour de la campagne.
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Il promet aussi de renégocier les contrats pétroliers et de pêche et dit ne pas avoir peur de sortir du franc CFA, y compris en allant jusqu'à la création d'une nouvelle monnaie nationale, une mesure que son adversaire Amadou Ba a dénoncé comme un "non-sens" économique.
Ses rivaux lui reprochent d'être à la tête "d'aventuriers" prêts à mener une politique de rupture dangereuse dans un pays réputé pour sa stabilité en Afrique de l'Ouest. Bassirou Diomaye Faye se présente comme quelqu'un de "particulièrement raisonné, de particulièrement raisonnable, de particulièrement sensé, de particulièrement réfléchi". Il a appelé à un "retour définitif à la sérénité" au Sénégal "qui a été gravement perturbée" ces dernières années.