Vidéo.. Musique : les coups de cœur d'Afrique en 2023
Afrobeat, jazz, électro, hip-hop, blues du désert ou morna… Voici les albums qui ont retenu l’attention de la rédaction au cours de l’année écoulée.
Chaque vendredi, Le Monde Afrique met en avant trois nouveautés musicales issues ou inspirées du continent. Pour terminer l’année 2023, nous vous proposons cette semaine une sélection des dix albums qui nous ont le plus séduits, classés ici par ordre chronologique de parution.
« Mademoiselle », de Rodolphe Burger, Sofiane Saidi et Mehdi Haddab
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C’est notre coup de cœur de l’année : Mademoiselle, un opus publié en mars par trois messieurs réunis par leur amitié avec feu Rachid Taha (1958-2018). Il y a là le rockeur Rodolphe Burger (voix, guitare), le prince du « raï 2.0 » Sofiane Saidi (voix, claviers, machines, basse) et Mehdi Haddab (oud électrique), qui s’est notamment illustré au sein du groupe Speed Caravan.
Nous emmenant de Sidi-Bel-Abbès, en Algérie, à Sainte-Marie-aux-Mines, en Alsace, où ont grandi Rodolphe Burger et, plus brièvement, Rachid Taha, le trio déploie sa poésie sur des mélodies fusionnant rock, raï et électro.
« Jolof Bass Music », de Guiss Guiss Bou Bess
Quittons la France pour le Sénégal, où le groupe Guiss Guiss Bou Bess, formé du chanteur Mara Seck, du percussionniste Aba Diop et du beatmaker Stéphane Costantini, propose une fusion originale de sonorités traditionnelles et de musique électronique, qu’il a nommée « électro-sabar ». En témoigne le mini-album Jolof Bass Music, sorti en mai, qui mêle avec talent chants griotiques, bass music, rythmiques ancestrales et deep house. Et pour ceux qui resteraient sur leur faim, le trio a enchaîné fin octobre avec un nouvel opus, Drum’n’Mbalax, dans lequel il accélère encore la cadence.
« Radio Sechaba », de Bokani Dyer
« Radio Sechaba parle de ce qu’est l’Afrique du Sud et réfléchit à une bande sonore qui pourrait accompagner ce thème. » C’est ainsi que le pianiste et chanteur Bokani Dyer présente son quatrième album, paru en mai. Né en 1986 au Botswana – où son père, le saxophoniste Steve Dyer, vivait en exil – et arrivé en Afrique du Sud en 1993, entre la fin de l’apartheid et l’élection de Nelson Mandela, le jazzman explore à travers quatorze compositions des thèmes liés à la construction de la nation (« sechaba », en setswana), à l’unité dans la diversité, mais aussi à l’introspection individuelle.
« Drum Money », d’Ekiti Sound
C’est une petite pépite d’électro que nous a livrée en juin l’artiste nigérian Ekiti Sound. Drum Money, son deuxième album (après Abeg No Vex, en 2019), rassemble dix-sept titres éclectiques et inventifs dans lequel le producteur mélange brillamment diverses influences, typiquement nigérianes comme la musique juju et l’afrobeat, ou internationales comme le hip-hop et le jazz.
Loin de travailler en solitaire, il a fait appel à divers talents de ses deux villes d’attache, Lagos et Londres, tels qu’Olugbenga Adelekan, le bassiste du groupe britannique Metronomy, ou la rappeuse Aunty Rayzor.
« Viral Wreckage », d’Aunty Rayzor
On retrouve la même Aunty Rayzor dans son premier album, Viral Wreckage, paru en septembre. Louvoyant entre hip-hop, R & B et électro, l’artiste nigériane dégaine, en anglais et en yoruba, son flow mitraillette au gré de douze courts morceaux expérimentaux qui vont de la trap la plus sombre et la plus rugueuse à la techno la plus effrénée, en passant par des envolées mélodiques planantes. Un talent brut qu’on découvrira bientôt au sein du groupe Twende Pamoja, qui rassemble également le violoniste français Théo Ceccaldi, la chanteuse tanzanienne Kadilida et le DJ ougandais Faizal Mostrixx.
« Sahel », de Bombino
Changement d’ambiance avec le chanteur et guitariste touareg Omara « Bombino » Moctar qui, après un silence de cinq ans, a fait paraître en septembre son quatrième album, sobrement intitulé Sahel à l’heure où la région est secouée par les violences djihadistes et les coups d’Etat à répétition. Si la musique adoucit les mœurs, on ne peut que recommander l’écoute des dix nouveaux morceaux de l’artiste nigérien, dont le « blues du désert » recèle de vertus apaisantes et d’une énergie pleine de bonnes ondes, portée par des riffs hypnotiques et la voix caressante du musicien de 43 ans.
« Cape Verdean Blues », de Kavita Shah
Angola, Sodade, Amor di Mundo… Ces morceaux, rendus célèbres par Cesaria Evora (1941-2011), figurent parmi les douze mornas et coladeiras que la chanteuse new-yorkaise Kavita Shah reprend dans son album Cape Verdean Blues, paru en septembre. Après avoir mené des recherches ethnographiques sur les traditions cap-verdiennes – notamment sur l’île de Sao Vicente et à Mindelo, ville de naissance de la « diva aux pieds nus » –, l’artiste d’origine indienne s’est associée au guitariste Bau, qui fut le directeur musical de Cesaria Evora, pour rendre hommage à cette voix emblématique de l’archipel.
« In Nomine Corpus », de Cindy Pooch
Depuis plusieurs années, on entendait régulièrement sa voix au sein de groupes lyonnais de trip-hop, de soul, de maloya ou de musique sud-américaine. Née en France et ayant grandi à Yaoundé avant de s’installer dans la « capitale des Gaules » pour étudier les lettres, Cindy Pooch s’est écartée de ces différents styles pour son premier album, In Nomine Corpus, sorti en septembre. On y trouve douze chansons envoûtantes, plus intimes et introspectives, où la chanteuse franco-camerounaise déploie son timbre lumineux, presque mystique, sur des rythmes semblant s’accorder aux battements du cœur.
« Off the Grid », d’Onipa
Enfin, direction Londres, où le groupe Onipa a fait paraître en octobre son deuxième album, Off the Grid, dans lequel il brasse de façon jouissive différents styles musicaux d’Afrique, du highlife ghanéen au kwaito sud-africain, de l’afrobeat nigérian au blues malien, le tout soutenu par des arrangements électroniques et des touches de rap et de jazz. Formé autour du multi-instrumentiste britannique Tom Excell et du chanteur ghanéen Kweku Sackey, le quatuor s’entoure de nombreux invités, dont la chanteuse sud-africaine Moonchild Sanelly et Dele Sosimi, ancien claviériste de Fela Kuti.