Vidéo.. France: Que contient la loi sur l'immigration ?
Régularisation exceptionnelle des travailleurs sans papiers, carte de séjour "talent" pour les médecins étrangers, mesures sur l'intégration et l’asile, éloignement facilité en cas d'infractions graves... Que contient la loi sur l'immigration ?
Le texte initial présenté par le gouvernement contenait 27 articles, le texte voté par le Parlement 86 articles.
Le Conseil constitutionnel a censuré plus du tiers de ces articles, introduits au cours de l'examen du texte au Sénat.
L'essentiel de la loi immigration
La loi comporte plusieurs volets : travail, intégration, éloignement mais aussi asile et contentieux des étrangers.
Travail des étrangers
Les travailleurs sans papiers exerçant dans des métiers en tension (BTP, aides à domicile, restauration...) pourront se voir délivrer à titre exceptionnel, comme aujourd’hui, une carte de séjour "travailleur temporaire" ou "salarié". Cependant, ils ne seront plus obligés de passer par leur employeur pour solliciter cette carte. Ils devront notamment justifier avoir travaillé au moins 12 mois (consécutifs ou non) au cours des 24 derniers mois, résider depuis 3 ans en France et de leur intégration. Les préfets disposeront d'un pouvoir discrétionnaire pour accorder le titre. Cette mesure sera expérimentée jusqu’à fin 2026. Le texte initial du gouvernement allait plus loin en matière de travail puisqu’il prévoyait la délivrance automatique d’une carte de séjour "travail dans des métiers en tension"(sous certaines conditions), ainsi que l’accès immédiat au travail des demandeurs d’asile des pays les plus à risques (et donc susceptibles d’obtenir le statut de réfugié).
Pour répondre aux besoins de recrutement dans les hôpitaux et les établissements médico-sociaux, une nouvelle carte de séjour pluriannuelle "talent - profession médicale et de la pharmacie" de 4 ans est instituée au profit des médecins, dentistes, sages-femmes ou pharmaciens praticiens diplômés hors Union européenne (PADHUE).
Les cartes de séjour "talent" destinées aux salariés qualifiés et aux porteurs de projet sont simplifiées.
Afin de lutter contre le travail illégal des travailleurs dits "des plateformes", la loi conditionne l’accès au statut d’auto-entrepreneur à la détention d’une carte autorisant à travailler sous ce statut.
Les sanctions contre les entreprises employant des travailleurs irréguliers sont renforcées.
Intégration et titres de séjour
Les étrangers qui demandent une première carte de séjour pluriannuelle devront avoir une connaissance minimale de la langue française (niveau A 2). Aujourd'hui, ces cartes de séjour, en général valables 4 ans, sont délivrées à la seule condition d'avoir suivi un apprentissage du français dans le cadre du contrat d'intégration républicain, mais sans obligation de résultat. Le niveau minimal de français exigé pour l'octroi d'une carte de résident et pour la naturalisation est par ailleurs relevé (niveaux B1 et B2).
Possibilités d'éloignement renforcées
La loi entend faciliter l'éloignement des étrangers qui représentent une menace grave pour l'ordre public. Elle permettra l’expulsion des étrangers réguliers, même présents depuis longtemps en France ou y ayant des liens personnels et familiaux, condamnés notamment pour des crimes ou délits passibles d'au moins 3 ou 5 ans de prison, selon la situation de l'étranger, ou impliqués dans des violences contre des élus ou des agents publics. Parallèlement, le juge pourra plus largement prononcer une interdiction du territoire français (ITF). La loi supprime par ailleurs les protections dont bénéficient certains étrangers irréguliers (étranger arrivé en France avant ses 13 ans, conjoint de Français...) contre une obligation de quitter le territoire français (OQTF). L’OQTF ne pourra être prise par la préfecture qu’après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de certains éléments (ancienneté de séjour et des liens de l’étranger avec la France...). Les mineurs étrangers continuent d'être protégés contre une OQTF.
L'interdiction de placer en rétention administrative les mineurs étrangers est posée.
D'autres mesures pour lutter contre l'immigration irrégulière complètent le texte : répression accrue contre les passeurs et les "marchands de sommeil", contrôle visuel possible des voitures particulières en "zone-frontière" (et non plus seulement des camionnettes de plus de neuf places)...
Asile et contentieux des étrangers
La loi prévoit le déploiement progressif de pôles territoriaux dénommés "France asile" après mise en place de 3 sites pilotes, en remplacement des guichets uniques d'accueil des demandeurs d'asile (GUDA). Ces pôles permettront en un même lieu l'enregistrement du demandeur d'asile par la préfecture, l'ouverture de droits par l'Office français de l'immigration et l'intégration (OFII) et l'introduction de la demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).
Les mesures censurées par le Conseil constitutionnel
Dans sa décision du 25 janvier 2024, le Conseil constitutionnel a censuré pour motif de forme 32 articles (en tant que "cavaliers législatifs" : articles sans lien suffisant avec le texte initial) et 3 articles sur le fond (en partie ou en entier).
Ces dispositions censurées, introduites en quasi-totalité par le Sénat, portent notamment sur :
l'instauration de quotas migratoires ;
l'exigence d'une durée de séjour régulier imposé aux étrangers pour l'accès à certaines allocations (aides personnelles au logement -APL, allocations familiales...) ;
le durcissement du regroupement familial ;
les restrictions sur l'accès au séjour des étrangers malades ;
le dépôt d'une "caution de retour" pour les étudiants étrangers ;
le rétablissement du délit de séjour irrégulier ;
les conditions d'accès à la nationalité française des jeunes nés en France de parents étrangers ;
la prise d'empreintes digitales d'un étranger clandestin sans son consentement ;
les conditions d’hébergement d’urgence des étrangers visés par une mesure d’éloignement ;
la prise en compte dans l’attribution de l'aide publique au développement du degré de coopération des États étrangers en matière de lutte contre l’immigration irrégulière.