Les États-Unis sont nos alliés, ils ne sont pas nos suzerains
Le retour potentiel de Donald Trump à la Maison-Blanche pourrait bien constituer un moment de vérité pour l’Europe, un appel pressant à sortir de sa torpeur et à reprendre la maîtrise de son destin
. "Cela doit conduire les Européens à comprendre que s’ils ne se préoccupent pas du destin de leurs pays, personne ne le fera pour eux", avertit le député français, François-Xavier Bellamy, siégeant à Bruxelles et à Strasbourg .
Face à la montée en puissance des rapports de force dans les relations internationales, l’Europe ne peut plus se permettre d’ignorer ses propres responsabilités.
Un constat lucide sur nos faiblesses
Bellamy invite les dirigeants européens à assumer un diagnostic sans complaisance. Depuis des décennies, l’Union européenne semble avoir fait le choix d’une dépendance stratégique et économique, notamment envers les États-Unis. Cette dépendance se manifeste crûment dans le domaine de la défense : "Aujourd’hui, [les pays européens] achètent 78 % de leurs armements hors de l’UE, en particulier aux États-Unis", note-t-il. Cette situation reflète une perte de souveraineté alarmante.
Le philosophe-politicien met en lumière une vérité essentielle : ce ne sont ni Trump, ni Elon Musk qui sont responsables des vulnérabilités européennes. "Accuser Trump et Musk de nos vulnérabilités, c’est s’excuser trop facilement de les avoir nous-mêmes organisées." Le véritable coupable, selon lui, est une organisation politique européenne incapable de garantir aux nations membres les conditions de leur autonomie.
La souveraineté comme objectif prioritaire
La souveraineté européenne passe, d’après Bellamy, par une reconquête des fondamentaux : "Le travail et la liberté, sans lesquels aucune prospérité n’est possible ; des forces militaires et des frontières solides pour ne pas subir les menaces extérieures ; l’exigence éducative et scientifique pour écrire à nouveau notre histoire." Il souligne que seule une Europe puissante peut s’imposer dans les négociations internationales. "Des pays européens qui seraient considérés comme une puissance économique incontournable et une alliance géopolitique sérieuse ne subiraient pas la même brutalité dans les négociations qui s’engagent."
François-Xavier Bellamy critique l’illusion persistante d’une armée européenne commune, la qualifiant de fantasme dangereux. Il appelle plutôt à investir dans une industrie de défense autonome : "La France prouve que c’est possible : elle est le 2e exportateur mondial pour l’industrie de défense. À nous de faire valoir cette force à l’échelle européenne, comme une garantie de sécurité pour le continent tout entier."
Une Europe à la croisée des chemins
Au-delà des questions techniques, le débat est profondément politique. Bellamy souligne une tension existentielle pour l’Europe : transformer en profondeur l’Union ou risquer la sortie de l’Histoire. Il rappelle que l’Union européenne, loin d’être une construction rationnelle, s’apparente davantage à une fuite en avant. "L’UE n’est pas une 'construction', elle est une fuite en avant", affirme-t-il, dénonçant le reniement de ses racines et l’érosion de la souveraineté nationale, symbolisée par le référendum de 2005 et son rejet par les Français.
Cette situation entraîne des conséquences dramatiques. L’Europe, confortablement installée sous le parapluie de l’OTAN, s’est habituée à la protection d’un suzerain, les États-Unis. "Les États-Unis sont nos alliés, ils ne sont pas nos suzerains." Pour François- Xavier Bellamy, l’Europe doit enfin assumer, de manière adulte, sa propre défense et se préparer à affronter un monde où seuls les rapports de force comptent.
"Pour ne pas sortir de l’Histoire, il faut retrouver une logique de puissance."
Le retour de Trump à la Maison-Blanche met en lumière les faiblesses structurelles d’une Europe qui a trop longtemps ignoré la nécessité d’une souveraineté réelle. François-Xavier Bellamy insiste : "Pour ne pas sortir de l’Histoire, il faut retrouver une logique de puissance."
Ce moment de vérité doit être saisi pour réinventer une Europe capable de se tenir debout, de défendre ses intérêts et de s’imposer comme un acteur stratégique sur la scène internationale.
En somme, ce n’est pas Trump qui précipitera l’Europe dans l’oubli, mais bien sa propre incapacité à s’affirmer. À ses dirigeants de choisir entre la résignation et la reconquête.