Consultant auprès de l'ONU à "Al-Ain News": Washington exhorte la France à quitter l’Afrique
Dans un entretien à "Al Ain News", le Consultant juriste auprès des Nations Unies, de l'Union européenne et de la Banque mondiale, Olivier d'Auzon est revenu sur le dossier du Niger du point de vue de Washington et de Paris.
Dans une tribune « Time’s up for France in Africa », « Le temps de la France est désormais compté en Afrique » qui sonne comme un coup de tonnerre pour Paris.
Michael Shurkin, ancien analyste de la RAND et de la CIA, met en perspective la politique de l’Oncle Sam en Afrique et le ressentiment anti-français dans le Continent.
Il juge que la France n’a aucun intérêt fondamental dans le Sahel – de fait son « pré carré » en Afrique n’existe plus que dans quelques têtes malades.
Qu’on y songe, Michael Shurkin l’annonce tout de go : la France doit rapatrier ses hommes, fermer ses bases et renoncer à tout rôle stratégique en Afrique, quitte à y conserver un reliquat de soft power par le biais de la francophonie.
Du reste, il juge que la France n’a aucun intérêt fondamental dans le Sahel.
Pour Michael Shurkin « sortir d’Afrique diminuerait, dans une certaine mesure, la stature globale de la France, mais la réalité est que la France – comme la Grande-Bretagne – a beaucoup de ressources et, franchement, d’autres priorités qui reflètent mieux ses intérêts ».
Etant entendu que les priorités mériteraient de se limiter uniquement à une participation accrue à la défense du glacis européen dans un cadre atlantiste et, éventuellement, à une présence exotique dans l’Indopacifique où lui manque un espace susceptible de déranger le système américain, note judicieusement Raphaël Chauvancy, chargé de cours à l’École de Guerre Économique, pour la Revue conflits dans son article : « Pourquoi l’Amérique veut-elle chasser la France d’Afrique ? ».
La misère croissante et l’insécurité persistante dans le Sahel en prédisposaient les populations à trouver un bouc émissaire ; à savoir la France. Or personne n’envisage le départ des Allemands encore moins celui des Américains…
Dés lors comment l’expliquer ? Paris selon Washington aurait : « sans doute entravé le développement économique et politique des pays africains ».
Chemin faisant, à l’instar de Raphaël Chavancy , on notera que la promotion de la désastreuse politique des minorités à l’anglo-saxonne a brisé le projet de société post-raciale qui constituait un des facteurs du rayonnement universaliste français.
Le financement par Washington de la mouvance extrémiste « décoloniale » a eu des effets délétères dans les banlieues françaises, mais aussi en Afrique francophone. Ses thèses victimaires complotistes, parfois relayées par les diasporas présentes en France, ont été prises pour argent comptant.
Si Moscou a financé et relayé le discours francophobe d’un Kémi Séba, Washinton a promu celui de Rokhaya Diallo.
Somme toute, la Russie et les Etats-Unis ont-ils agi de concert pour écarter Paris.
Qu’on se le dise, une campagne de sape a été menée savamment, et ce de longue date pour orchestrer le French bashing et les opérations d’influence américaines, fait remarquer Raphaël Chauvancy.
Et force est de constater que la France n’a pas vu venir le coup et s’est laissée piégée par des récits subversifs mâtinés d’islamophobie d’État française, adressés à une jeunesse frustrée et désœuvrée si perméable aux récits décoloniaux profanés contre la France tant en Afrique que dans les banlieues françaises.
Cette posture de l’Oncle Sam contre les intérêts de la France en Afrique, saurait trouver leur explication par le fait, que les Etats-Unis ne tolèrent pas cette volonté d’autonomie, si chère à la France. Pour les Etats-Unis, il convient de rentrer dans le rang.
De fait, les Américains ont une logique de bloc et conçoivent l’alliance comme un alignement. Toute distorsion est désormais assimilée à une trahison.
Dans cette perspective, tout en apportant loyalement un appui indispensable à l’action de Barkhane, ont-ils avancé leurs pions et développé leurs propres réseaux. Depuis son retrait du Mali, ils ne croient plus Paris capable de tenir un front, même secondaire en Afrique. Dans ce contexte, Washington exhorte Paris à trancher sur le sort qu’elle réservera à ses 1 500 militaires présents sur le territoire Nigérien.
Malgré ses remarquables succès militaires tactiques, elle s’est ridiculisée en Centrafrique, au Mali, au Burkina, au Niger.
Et« si pour Washington, il faut tirer un trait sur le retour à la légalité constitutionnelle au Niger, il n’hésitera pas. Les militaires nigériens ne poseront probablement pas de problème d’ailleurs: ils savent que sans les capacités de surveillance américaines, tous leurs efforts pour combattre les djihadistes sont vains», confesse à demi- mot un diplomate.
On l’aura compris, Paris est carbonisé, sa position est intenable.
Dans ce contexte, Washington a bien conscience de ce qu’il est en mesure de sauver. A ce jeu, il sait pertinemment qu’il a tout à perdre à s’aligner sur Paris.
En clair, Washington, n’hésitera pas à prendre langue avec les putschistes. Pour Paris, rien ne va plus, les jeux sont faits.
Et quant aux tergiversations de la CEDEAO, faute de soutien occidental, l’intervention militaire n’ira pas bien loin. Force est de constater que ces circonstances ne militent assurément pas pour Mohamed Bazoum- les carottes sont-elles désormais archi-cuites ?